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  • Deux voix

    Deux voix

    • Quelques notes du bout des doigts ont réveillé les ombres du temps. Mon cœur a palpité.Hypnotique douce rythmique légère profonde et fragile, la musique tisse un lien vers le passé et tire le fil pour le rembobiner jusqu’à moi.
      Dans le téléphone une voix d’outre-temps, d’outre-vie, franchit les années
      et parle comme si hier était aujourd’hui.

      La voix se greffe sur la mélodie.
      Sur la mélodie se greffent les sons électroniques.
      Sur la voix se greffent
      les souvenirs, les fantômes, deux époques, deux géographies,
      des regrets teintés de douceur.

      Deux esthétiques s’entrelacent comme mes différences aux tiennes.
      Elles dansent et s’effleurent. Un peu plus de quatre minutes.

      Elles sont lieux se dire le souvenir des mains qui se cherchaient, des peaux qui se frôlaient, des heures qui se croisaient.
      Se dire qu’elles ne peuvent pas faire mieux. Qu’il n’y aura pas de regrets.

      Danse avec moi. Effleure-moi. Un peu plus de quatre minutes.
      Si je ferme les yeux la musique voyage.
      Je danse avec toi et tu m’effleures.
      Nos mains se cherchent, nos peaux se frôlent, nos heures se croisent.
      Il n’y a pas de regrets. Nous ne pouvions pas faire mieux.

      Deux voix. Je suis douceur et tu es fièvre.

  • J’ai écrit

    J’ai écrit

    J’ai côtoyé la dangereuse, la sournoise vertigineuse, j’ai côtoyé la mort.
    J’ai côtoyé l’attrait du vide, insensible rive de l’oubli, j’ai côtoyé la mort.

    J’ai voulu faire cesser la douleur assassine lente décomposition d’un esprit trop fragile.
    J’ai demandé à mon corps trop lourd de me laisser tomber doucement dans les vapeurs inodores et indolores de la mort.

    J’ai écrit la mort dans un dernier sursaut de vie comme un dernier regard qui s’accroche aux reflets fuyants du monde des vivants.

    J’ai voulu me maudire, me punir, me détruire.
    J’ai voulu griffer ravager arracher mes cheveux mes yeux mes cils mes doigts mes seins ma peau, j’ai voulu saccager ce corps que tu as touché sans aimer, j’ai voulu me défigurer m’amputer.
    J’ai voulu vomir l’obsession de la haine.

    J’ai écrit.

  • Invisibles

    Invisibles

    Que ce soit comme ça, ou par choix, ils sont souvent dehors, occupés à compter leurs pas solitaires et frêles silhouettes :survivants de la rue, la simple notion du temps leur semble extraordinairement exclue Quand le sommeil ne les prends pas ;qu ils rejettent Morphée, qu’ils s’extirpent de ses bras :ils s’en vont marcher,une bouteille à la main,parfois pour se réchauffer un mois de janvier,pas d’autres moyens . Et si ,s acheter un chien ,qu’ils peineront, même à jeun ,à nourrir constamment.ou alors ,la garde à vue quand la nuit froide fait mourir. Poussant un caddy ,portant sac à dos ,vous contemplez la ville,longeant le quai,lumières sur l’eau. Et lorsque vous levez la tête, brouillé par le whisky, vous êtes absorbés par les étoiles ,vous sentant si petit:le voile nocturne tacheté de nuages,picoté d astres ,restez donc rêveur devant l immensité de l univers.inspirez ces vapeurs, ressentez cet air. Car demain matin, combattant l’envie de dormir, vous ressentirez la faim, et votre solitude revient, au milieu de tous ces gens. Ces gens préférant le revenu, préférant l’obéissance, démontrant une ignorance dont vous êtes dépourvu. Puisque vous savez la solitude douloureusement bléssante, poussant à la folie qu’on pensait loin., aux délires d’un être seul, si désespérément humain. Pour les menteurs de bas étages qui diront :”on sy habitue”. Ne vous prenez pour des durs, la vie est une lutte sans victoire, sans l’espoir de voir un jour les étendards baisses et le drapeau blanc se hisser. Je peux me moquer de ceux là, j’en fait parti. Mais vous savez plus que moi qu’est l’opinion, les avis. Vous le sentez dans le regard fuyant de tous ces passants, les remarques indiscrètes sur le ringard de vos vêtements. J ose vous parler et pourtant je suis de ces gens là. C’est triste à dire ,je sais ,mais parfois J ai ETRE d’être moi. Je me plains pour des choses que beaucoup n’auront pas. mais il y a une bizarrerie que vous possédez vous et pas la société. C’est une idée étrange. …appelé LIBERTÉ.

  • Jusqu’au fond du cœur ❤️

    Jusqu’au fond du cœur ❤️

    Il Faut s’aimer soi-même avant d’aimer

    Elle a consacré toute sa vie

    À un homme qu’elle considérerait comme son mari.

    Elle a coupé les ponts avec sa famille et ses amis selon ses exigences.

    Pensant que le véritable amour réside dans la patience.

    Elle s’est donnée corps et âme pour être une bonne femme,

    Ignorant les blessures et les blâmes.

    Elle s’adonnait intégralement pour la bonne marche de son foyer.

    Car, tout ce qu’elle voulait c’est “être aimé”

    Malgré tous ces efforts,

    Elle était la seule dans l’histoire qui a toujours tort.

    Elle devait tout tolerer sans parler.

    La voiture était destinée à être scellée.

    La supplice, la misère, le malheur résumaient sa vie,

    Elle a abandonné et tout donné pour vivre avec son mari.

    En compensation, ce dernier l’a chassé en pleine nuit.

    Elle, qui était la définition même de la beauté, se trouvait sans abri.

    Humiliée, abandonnée, elle repense à son passé,

    Regrettant d’avoir tout laisser tomber.

    Cette vie qui était pleine d’espoir,

    S’est effondrée peu à peu, dans le noir.

    En pensant à sa vie qui était toute en rose,

    Dévasté ,enlaidir, elle souhaitait une seule chose.

    S’écarter de ce monde le plus vite possible,

    Pour être seule, à peu près paisible.

    Elle a écrit une lettre, avant de s’autolyser.

    “Aimer, c’est tout donner en attendant rien en retour,

    L’amour endure tout, pardonne tout, mais on ne force pas l’amour.

    La priorité est de se sentir bien et aimer.

    Il faut apprendre à s’aimer, avant d’aimer,

    Pour ne pas se sentir mal lorsque le cœur est brisé.

    L’amour demande beaucoup de patience et de sacrifices

    Cependant ne vous laissez pas aveugler en cédant à tous les caprices “

  • Réveil

    Réveil

    Illusion d’un instant parfait

    Que rien de viendra troubler,

    Quand tout à coup le clocher

    S’amuse à se balancer.

    Le réveil, long et pénible,

    Le café, froid et amer,

    Font de moi la victime

    D’une journée de galère.

    Envolée la notion de plaisir,

    Oubliés les draps, leur douceur,

    Puisque dans ce proche avenir

    Je n’y vois que dur labeur.

    Quelle est donc cette raison insolite

    Qui nous pousse hors du lit ?

    C’est cette société qui nous invite

    À aller gagner notre vie.

    Le sourire me revient doucement

    Car je pense à l’après,

    Quant je savourerai le moment

    Du retour au coucher.

  • J’y aurais plus chaud

    J’y aurais plus chaud

    Emmenez-moi en enfer,
    J’y aurais plus chaud.
    Les esprits s’agglutinent à la terre,
    Les songes finissent au fourneau.

    Ce monde est si froid, vous savez;
    Emboitez le pas et vous finirez gelé.
    Laissez donc s’envoler vos chimères;
    Epousez mon fatras;

    Et retournez à vos guerres.

  • Rose perdue

    Rose perdue

    Perdue, petite fleur
    Aux pétales noires
    Aux racines fébriles.

    Une tempête ? Un simple souffle
    Peut lui faire perdre son charme exotique

    Elle a juste besoin de lumière
    Et que l’eau qui s’écoule de ses feuilles
    Ravive le ruisseau de son amour.

  • Bella

    Bella

    Dans la fumée et la pénombre se révéla un ange, qui trop souvent j’ai vu endormi. Son auréole a longtemps attendu une tête souriante, sur laquelle se reposer sans bruit. Tout commença lorsque sa chevelure noire d’ébène, se déposa alors divine sur un teint de porcelaine. Les secondes se firent heures, et mon âme, sortie de sa torpeur, observait. Le temps s’en alla puisque  concept démodé, dans un monde où devant moi, un ange s’activait. Fondirent comme la foudre, ces mains de femme devenues flamme. Chorégraphie de tous ses jours, les phalanges se mirent à danser, avec pour partenaire et ondulant autour, quelques jolies mèches de jais. La perfection spontanée dans ce geste quotidien, cette manière de se mouvoir que je voulais sans fin, tout ne laissa derrière lui, qu’un formidable chaos. Une heureuse confusion qui me laissa coi, la cohue guida mon cœur au ciel et au-delà. Dès lors, mon corps mort discernait encore ses doigts graciles mais quelque chose se passait. L’air en rien ne devient moite, ni gorgé d’envie, j’eus seulement été en paix pour la première fois de ma vie. Cette femme donnait un aperçu fugace, un goût de paradis je n’ai, pour seul retour hélas, esquissé qu’un sourire et demi.

  • Coeur meurtri

    Coeur meurtri

    J’ai fui l’amour, le vrai, j’ai tout fait pour rattraper le coup mais le mal je me l’étais fait. Le résultat est catastrophique, tout n’est qu’une succession pathétique d’échecs sentimentaux symptomatiques d’un cocktail fantastique, un bon manque d’expérience mêlée à la peur, une pincée de malchance et des erreurs, en découla beaucoup de souffrance et une absence du cœur. Me voilà devenu fébrilité et méfiance, je crains les filles mais feins l’indifférence, c’est plus facile si j’étouffe en moi la flamme, si je cache à mes pupilles l’étrange beauté des femmes, et si tout part en vrille, si on me reprend mon âme, il faudra que je me recroqueville, que je sonne l’alarme, que je parte à mille lieux d’ici, loin, là-haut, dans la montagne.

  • Les couleurs de l’automne

    Les couleurs de l’automne

    Les couleurs de l’automne

    Sont brillantes et voyantes

    Couleurs du sang frais et de la fête

    Sont toujours si proches et engageantes

    Le carnaval et le carnage

    Une seule et même histoire des gens

    Qui sont des clowns et des tueurs

    A la fois

  • La Mer

    La Mer

    Te voir à l’horizon, illumine mon âme

    T’entendre apaise mes pensées angoissées

    Tu es mon abri, l’unique endroit où je me sens rassurée

    Camaïeu de bleu qui réchauffe mon corps

    Exaltée par ta beauté, je suis ancrée sur le sable blanc

    Je respire, je vis.

  • L’irrévocable voyage de Valentine la vachère

    L’irrévocable voyage de Valentine la vachère

    Partir, partir loin, très loin. Valentine l’avait déjà fait. La petite vachère avait pris le chemin le plus long qui soit. Son voyage immobile et silencieux avait débuté cinq années auparavant lorsqu’elle avait senti du chanvre rêche enserrer son cou. Quand bien même saurait-elle que le monde existait au-delà des limites du canton de Senlis, quand bien même son corps pourrait-il naviguer vers Valparaiso , la « perle du Pacifique » ou déambuler dans le marché aux perles d’Hyderabad, à présent il resterait ancré entre des murs blanchis à la chaux. Voyager dans l’autre hémisphère planétaire ne l’empêcherait nullement de rester enfermée dans ses deux hémisphères cérébraux car c’était en eux qu’elle vagabondait.

    À son arrivée ici, par mesure de précaution, sa longue chevelure hirsute avait été rasée, son corps lessivé et son âme infantilisée. Un traversin, un oreiller, une couverture et une courtepointe lui avaient été fournis. Que Valentine soit comme aujourd’hui dans le confort d’un asile et sur une paillasse propre ou, comme hier dans l’indigence d’une étable et sur la paille brute entourée de ses vaches, elle avait les yeux fixes et la bouche scellée : le monde l’indifférait. Son corps n’avait plus d’existence tangible et son esprit s’était envolé dans des univers de comètes et d’astres thaumaturgiques.

    Comme Séraphine Louis, elle aurait pu exulter grâce à une nécessité intérieure de création et faire jaillir de luxuriants bouquets de fruits et de fleurs, mais sa conscience s’était évadée et entreprenait la conquête de mondes éthérés. Elle partait pour de merveilleuses odyssées célestes immobiles.

    Pareille à une bulle indolente et libérée de l’attraction terrestre, Valentine flottait dans un espace constellé où d’autres fines et légères sphères révélant le spectre de l’arc en ciel, arrivaient en salve serrées et éclataient au contact de sa peau insensible. Elle les laissait frôler son dos lacéré et son ventre outragé. Le déplacement circulaire de particules invisibles que produisait la translation des boules souples, faisait frissonner son âme et lui rendait le souvenir de la douceur des caresses maternelles. Son extravagant périple l’emmenait sur une étoile égarée ou une planète discrète. Inéluctablement, sa vie rêvée prenait fin : c’était alors qu’elle planait lentement vers ce qui lui semblait être la Terre et lévitait à quelques pouces du sol, puis papillonnait jusqu’aux ruines d’une église romane identique à celle qu’elle avait aperçue sur un journal illustré posé sur la table de cuisine de ses anciens maîtres ; l’arche d’entrée en plein cintre trouait une façade dont la plupart des blocs de granit avaient chu ; à l’intérieur, de folles et hautes herbes humides couraient entre les dalles disjointes du pavement ; La grande rose de l’abside dépourvue de vitraux se découpait en une fine dentelle sur le ciel stellaire.

    Valentine n’avait plus de souvenir de la perception des vivants, elle avait laissé son corps souillé et n’avait gardé que son esprit innocent.

    Le matin du dernier jour d’octobre 1898, entrant dans sa chambre, une cornette essaima de douces messes basses tout en ouvrant la fenêtre du chien-assis. Les miasmes de la nuit aventureuse de Valentine s’échappèrent vers l’empyrée automnal. Après avoir secondé la jeune vachère lors de ses ablutions matinales et déposé un repas frugal sur le chevet, la sœur sortit. À l’instant précis où la porte se referma, un piaf pelé et pépiant, aux yeux mobiles, atterrit sur l’espagnolette en position horizontale. Son petit corps famélique était entraîné dans une gigue comique : l’absence de patte gauche ne l’empêchait pas de balancer son corps, tout en ébrouant son miteux plumage contrastant avec son joyeux ramage. Il s’introduisit dans la chambre monacale : l’impudent voleta et se posa sur le haut du dossier d’une chaise en paille. Comme étonné de voir un humain, il se figea, se tut et fixa ses prunelles noires dans le regard adouci de Valentine. Son petit crâne presque chauve se pencha vivement sur le côté. Maintenant, sa tête dodelinait de gauche à droite. L’amusant et répétitif hochement s’arrêta et il se remit à chanter. L’aubade dura de longues minutes. L’internée était sous le charme. À nouveau, l’oiseau cessa son gazouillis. Prestement, il s’élança, atterrit sur le plateau du chevet et picora les miettes de pain égarées. Il lui suffit d’un coup d’aile pour se poser sur l’avant-bras de Valentine qui frissonna : le contact de la petite patte griffue offrit à la jeune fille de renouer avec les sensations que pouvait lui donner sa peau. À gestes mesurés, elle caressa délicatement le volatile. Le sauvage aurait dû s’enfuir, mais contre toute attente, il fit un petit saut afin d’atteindre le pouce de Valentine qui sursauta légèrement. Il fixa ses petites billes d’onyx sur l’humaine hébétée, puis reprit son chant.

    Des liens se nouèrent entre les deux éclopés : malgré la froide humidité de l’arrière-saison, Valentine prit l’habitude de laisser la fenêtre ouverte afin de donner à l’oiseau, toute latitude pour venir égayer sa claustration ou repartir dans les gris d’automne. L’assurance naturelle du moineau le menait à picorer les restes de pitance qu’elle lui réservait, et souvent il prenait ses aises en se perchant sur le haut du crâne de Valentine et lui contait ses nombreuses excursions dans un langage qu’elle comprenait. Alors, elle s’imaginait accrochée à son cou, survolant la terre des hommes, virevoltant d’arbre en arbre, s’élevant vers les cieux radieux, piquant vers un champ de blé mûri et folâtrant dans la glèbe retournée à la recherche de quelques vermisseaux. Libérée de ses attaches terrestres, la vachère faisait partie intégrante du royaume d’en haut où elle respirait un air inconnu et devenait maîtresse d’un monde de lilliputiens qui s’agitait sur le plancher des vaches. Grâce à son ami à plumes, elle faisait de nouvelles explorations sédentaires plus belles les unes que les autres.

    Au début, ce ne fut qu’une légère gêne au niveau de ses omoplates, puis les jours passant, Valentine ne put se coucher sur le dos. Sa camisole devenait de plus en plus étroite. Le dix-septième jour de novembre 1898, à l’instar des êtres indépendants, l’oiseau prit son essor et ne revint pas. Quelques temps après avoir réalisé la défection du volatile et son abandon, Valentine ôta l’oripeau de toile et voulut le rejoindre. Elle déploya son pennage, lissa ses rémiges et prit elle aussi son envol.

    Cinq années auparavant, le maréchal des logis Durieux avait trouvé Valentine à quelques pas du chemin de fer. Il se souvenait de ce jour maudit comme si c’était hier. Il revoyait le disque solaire jaunâtre qui peinait à éclairer ce dernier jour d’octobre de l’an 1893. Il se remémorait tous ses gestes : il avait délivré les poignets de la jeune vachère entravés par une corde ; il avait délié l’autre cordelette enserrant son cou gracile ; il avait recouvert de sa vareuse, la peau opaline de la gisante violentée ; à ce moment-là, il avait perçu une fine brume sortant des narines ensanglantées ; immédiatement, il avait fait quérir un chariot afin de la transporter à l’hôpital de Senlis et l’avait accompagnée. Depuis lors, la jeune rescapée était restée dans un profond mutisme et avait montré une totale désaffection envers le monde.

    Pendant ces cinq longues années, le gendarme n’avait eu de cesse de trouver l’infâme qui avait perpétré cet acte odieux, mais hélas son enquête fut vaine. Depuis cet abominable crime, indéfectiblement, tous les mois, il rendait visite à Valentine, lui apportant quelques bouts de savon, des mitaines, un châle tricoté avec soin par son épouse ou bien encore un panier garni. Ce fut avec une profonde peine qu’il apprit l’irrévocable voyage de Valentine la vachère : sa défenestration.

    Dans la mélancolie de novembre, les pans des pèlerines de quelques cornettes claquaient au premier vent septentrional. Caché par le petit groupe de sœurs, tête baissée, on pouvait apercevoir un homme d’arme aux yeux couleur chagrin, en tenue de cérémonie se recueillir devant le carré des indigents.

  • Syrith – la langue des élites

    Syrith – la langue des élites

    Clara, l’une des élèves les plus prometteuses de sa classe, se distingue non seulement par l’éclat de son esprit mais aussi par la facilité avec laquelle elle saisit les abstractions. Ni la philosophie, ni les arcanes des mathématiques ne lui échappent. Elle a toujours été la première à poser les questions justes, à découvrir les réponses avant même que les autres n’aient eu le temps de les formuler. Cependant, aujourd’hui, un obstacle inattendu se dresse devant elle : le Syrith.

    Assise à son pupitre, ses yeux rivés sur les caractères énigmatiques qui tapissent la page devant elle, Clara se sent comme prisonnière d’un labyrinthe sans issue. Elle parcourt les symboles du regard, s’efforçant de décoder leurs significations profondes, mais une étrange brume semble les envelopper. Ces signes, autrefois clairs et puissants dans leur simplicité, se dérobent maintenant à sa compréhension. Ils lui apparaissent vides, comme des coquilles sans substance, des motifs sans logique apparente.

    Elle se redresse, un frisson d’incertitude la saisissant. Autour d’elle, ses camarades, absorbés dans leur propre travail, semblent progresser sans effort. Leurs plumes dansent sur la page, inscrivant des caractères sûrs et maîtrisés, tandis que Clara se trouve désorientée, désemparée. Elle connaît la théorie, a étudié avec diligence la structure du Syrith et la philosophie qui en découle. Mais la pratique s’avère une tout autre affaire, une bataille intérieure qu’elle n’avait pas prévue.

    Les mots flottent autour d’elle, insaisissables, comme des mirages. Chaque phrase semble déformée, faussée, comme si un voile de confusion s’était déposé sur son esprit. Il lui est impossible de capter l’essence de ce qu’elle voit ; elle peine à établir la connexion entre les symboles et les idées qu’ils sont censés transmettre. Une brise légère souffle à travers la fenêtre ouverte, agitant doucement les rideaux et ajoutant à l’atmosphère de doute qui la submerge. Clara laisse échapper un profond soupir, passant une main distraite dans ses cheveux. “Comment ai-je pu en arriver là ?”, se demande-t-elle. D’ordinaire, elle est la première à comprendre des concepts complexes, à démêler les fils invisibles entre des idées apparemment disparates. Mais cette langue, le Syrith, lui résiste, et pour la première fois, Clara ressent une forme d’impuissance.

    C’est alors que M. Aricel, d’un pas mesuré, s’approche d’elle, observant sans un mot la lutte silencieuse qui se joue sur son visage. Clara, bien qu’habituée à son calme implacable, ressent un léger frisson lorsqu’il s’arrête près de sa table. Son regard perçant semble pénétrer jusqu’au fond de ses pensées, et une pression subtile mais indéniable s’installe.

    • « Clara, que trouves-tu dans ce passage ? », demande-t-il d’une voix douce, mais ferme.

    Clara hésite un instant. Elle sait ce qu’elle doit dire, mais les mots lui échappent. Le texte semble lui glisser entre les doigts, comme un filet qu’elle peine à saisir. Elle se mord la lèvre, ses yeux errant sur les symboles sans pouvoir en saisir le sens véritable.

    • « Je… je vois des symboles qui devraient représenter la transformation du temps, mais je n’arrive pas à comprendre comment l’idée du “τ” s’intègre ici. Il y a une rupture, je crois, mais… » Elle se tait, une fraction de seconde, avant de reprendre d’une voix moins assurée : « Je ne sais pas comment l’interpréter. »

    Elle s’arrête, la gorge serrée, cherchant à masquer sa frustration. Comment pourrait-elle ne pas saisir ce qui paraît pourtant si évident pour les autres ? Comment peut-elle être ainsi bloquée ? Elle est censée maîtriser cette langue, être capable de dépasser les autres dans cette discipline. Et pourtant, les symboles du Syrith semblent se dérober à son esprit, comme un code complexe auquel elle n’accède pas.

    M. Aricel, sans prononcer un mot, baisse les yeux sur le texte. Il trace doucement du doigt le “τ”, symbole de transition, mais d’une manière particulière, comme s’il l’examinait sous un autre angle. Ses doigts effleurent le papier, dessinant des marques discrètes autour du symbole, puis il murmure d’une voix basse et mesurée :

    • « Le “τ” ici ne désigne pas simplement un passage du temps, mais une déformation de ce temps. Un changement, certes, mais un changement où la pensée elle-même agit sur le flux du temps. Comme si l’espace et le temps se tordaient sous l’influence de la réflexion. »

    Clara fronce les sourcils, tentant d’assimiler ces mots. La notion de « déformation » résonne en elle, un concept étranger mais puissant. C’est une idée qui va au-delà de la logique conventionnelle, mais qui semble être la clef de cette langue.

    • « Une déformation… du temps… » murmure-t-elle, les yeux perdus dans le texte. « Je crois comprendre, mais comment exprimer cela, comment rendre ce concept en mots ? »

    M. Aricel, implacable, pose une main tranquille sur le bord de la table, comme s’il attendait un instant de plus que l’illumination vienne d’elle-même. Un silence s’installe, lourd et presque sacré. Puis, se penchant légèrement vers elle, il déclare d’un ton posé, mais d’une fermeté indiscutable :

    • « Clara, ce que tu vois ici n’est pas un simple passage, ni un changement banal. Ce n’est pas une question de logique ni d’analyse. C’est la perception même du changement qui est devant toi. Si tu ne vois que la transition, tu ne perçois que la surface des choses. Si tu cherches à saisir la déformation, alors tu commences à comprendre l’essence même du phénomène. »

    Clara, frappée par la force de ces mots, se laisse submerger par une vague de réflexion. Elle ferme les yeux un instant, cherchant à intégrer cette perspective nouvelle. Le temps, la pensée, la transformation… Ces concepts qui paraissaient jusque-là abstraits prennent désormais une forme plus fluide, plus mouvante. Elle ouvre de nouveau les yeux et se penche sur le texte. Quelque chose a changé. Les symboles, loin d’être étrangers, semblent se réorganiser sous un autre éclairage, comme si une clé invisible venait d’ouvrir un verrou. Un à un, les caractères du Syrith se laissent apprivoiser. Clara commence lentement à retranscrire le passage, chaque mot vibrant avec une nouvelle énergie, une nouvelle signification.

    Cependant, elle le sait, cette compréhension ne viendra pas sans effort. La voie reste semée d’embûches, et le Syrith, loin de se livrer facilement, impose sa résistance. Mais pour la première fois, Clara sent qu’elle effleure quelque chose d’essentiel, une pensée plus fluide, plus nuancée, plus vaste que celle des autres langues.

    Peut-être, en fin de compte, est-ce là la véritable clé du Syrith : une pensée en perpétuelle métamorphose, qui échappe à toute rigidité et s’adapte à la nature mouvante du temps et de l’esprit.

  • Océans

    Océans

    Beau et lisse comme une peau

    Sous le soleil, brille comme un joyau

    Les oiseaux virevoltent là-haut

    Fondent sur toi, pénètrent tes flots

     

    Glissent quelques voiliers

    Des océans les preux chevaliers

    Tu nous fais tellement rêver

    En nous offrant la liberté

     

    Il nous reste tant à découvrir

    Source de notre avenir

    Un univers tout entier

    Dont dépend l’humanité

     

    Mais l’homme dans sa conquête

    Oublie le roi de la fête

    Préfère le pétrole

    Comme triste symbole

     

    Tes habitants sont massacrés, anéantis

    Victimes de notre saleté, notre folie

    Ton ire est à la hauteur

    Des malheurs étouffant ton cœur

     

    Elle débute comme le zéphyr

    Juste pour nous prévenir

    En ouragan se transforme

    Terrible capharnaüm

     

    Ta fureur se décuple, se déverse

    Ton tsunami ébranle nos forteresses

    Laissant derrière lui

    Des vies à jamais meurtries

     

    La tempête est passée

    La colère retombée

    La leçon est incomprise

    L’imbécile reprend ses bêtises

     

    Photo de
    johnnyA_NZ