4:30 du matin, mon rĂ©veil sonne et son petit Ă©cran bleuâtre me fait plisser les yeux. Je me lève pĂ©niblement et assis sur mon lit, je regarde longuement Ă travers la fenĂŞtre en forme cubique. Ma chambre plongĂ©e encore dans l’obscuritĂ©, seuls les nĂ©ons des grattes-ciels de la ville, reflètent mon corps couvert de cicatrices, que j’essaie de couvrir tant bien que mal, depuis quelque jours. Je me suis enfin trouvĂ© un boulot dans un bar en bas du quartier, il faut bien que je sois prĂ©sentable pour mon premier jour. Je regarde le calendrier accrochĂ© sur mon mur, “24 mars 3000” et l’humanitĂ© n’avait pas l’air d’avoir changĂ©, ou c’est peut-ĂŞtre simplement moi, qui n’a pas changĂ©. Cette rĂ©flexion un peu bizarre, car j’en ai pas l’habitude, m’est venue entre deux vols de zotĂ©ros après avoir lu ce passage d’un bouquin dans le rayon spirituelle d’une bibliothèque. Il disait  : “vous percevez le monde Ă travers votre mental” et depuis quelque jours cette phrase revenait souvent dans mes moments de vide, de solitude. Donc la vie n’est en rĂ©alitĂ© pas cruelle, sombre et horrible ? Mais c’est moi qui suis cruel, sombre et horrible ? Mais peut-ĂŞtre que j’ai raison sur un point, l’histoire de l’humanitĂ©, Ă part ses avancĂ©es technologiques, n’avait dĂ©finitivement pas changĂ©. Les livres d’histoires sont regorgĂ©s de guerres qui n’en finissent pas, la soif de l’argent et la domination sur les faibles ont perdurĂ© jusqu’à aujourd’hui. MĂŞme après la cĂ©lèbre deuxième guerre mondiale oĂą l’humanitĂ© aurait cru pouvoir se passer de la guerre, nous y sommes Ă notre 60ème guerre mondiale.Â
Je vis seul dans une boĂ®te au milieu d’autres boĂ®tes, dans la plus grande mĂ©gapole du pays, MĂ©gatopia. Quoique tu es belle avec tes nĂ©ons et tes millions de choses Ă voir et Ă faire, tu possèdes ta part d’ombre; criminalitĂ©s, suicides et violences surviennent au quotidien dans les recoins de tes rues dans les quelconque familles ou couples. La preuve que la misère humaine ne peut ĂŞtre cachĂ©e et enfouie par tes nĂ©ons et tes grattes-ciels. Mais c’est bien une illusion n’est-ce pas ? Un rĂŞve ? Puisque c’est mon mental qui…Â
MĂ©gatopia n’est pas en forme aujourd’hui, c’est la pluie qui devrait faire ça et cela lui donne cette ambiance lugubre. Les zotĂ©ros qu’on appelait jadis, les “voitures” roulent, ou plutĂ´t, survolent les routes, elles font dorĂ©navant partie du paysage. Les routes, si l’on peut encore les appeler “des routes”, sont simplement des bandes lumineuses magnĂ©tiques Ă couleur changeante selon leur types et les zotĂ©ros eux aussi, magnĂ©tiques, les survolent Ă environ 3 mètres de distance, pas plus. Après les nombreux accidents de l’an 2950 oĂą l’on autorisait encore les zotĂ©ros Ă voler Ă plus de 50 mètres de hauteur, c’est fini tout ça. D’ailleurs, je suis en route pour en voler un avant mon shift, c’est un cas exceptionnel car c’est le matin et puisque j’ai congĂ© demain, je pourrais en profiter pour le revendre Ă la mĂŞme heure.
-Hey Arthur ! Arthur !
C’était l’un des guetteur qui m’appelait ainsi, je l’avais engagé la semaine passée pour qu’il fasse le guet lors d’un de mes nombreux soirs de vols de zotéros.
J’essayais de faire semblant de ne pas l’entendre et continuais de marcher.
-Hey !! Hey !Â
Il me rattrapa tout de même, le souffle coupé :
-Tu te rappelles pas de moi ?Â
Il Ă©tait jeune, je savais qu’il ne fallait pas que je l’engage l’autre soir. Il m’avait contactĂ© après avoir reçu mon numĂ©ro depuis un autre guetteur, qui avait travaillĂ© avec moi il y a quelques mois. J’essayais de m’en passer de guetteurs car il faut les payer. Mais j’en avais besoin pour ce coup au centre ville et ce petit jeune Ă©tait idĂ©ale pour me faire un peu d’économie. Ils pullulent Ă MĂ©gatopia depuis que le taux de chĂ´mage a grimpĂ© depuis l’annĂ©e passĂ©e.
-Ecoute, file vite fait, on ne se connaît pas.
Je me rappelle que j’avais failli me faire attraper Ă cause de lui. J’Ă©tais en train de voler une zotĂ©ro parquĂ©e dans une rue cachĂ©e. Bon, je savais qu’en l’engageant je risquais gros mais bon, au centre ville, on fait pas son malin et on prend ses gardes. Bref, je l’avais engagĂ© pour l’arnaquer au niveau de la paie, au lieu de le payer 30 millions, je lui donnais 5 millions. Mais puisque c’était son premier coup et qu’il n’avait pas beaucoup d’expĂ©rience, il n’a pas vu les deux zotĂ©ros de flics passer au loin. Bien sĂ»re, elles se sont arrĂŞtĂ©e en face de lui :
-Alors comme ça, vous vous “promenez” ? le questionnaient.
-Oui, oui, Mégatopia est assez joli vous savez, en superficie…
Je me tapa la tête contre la carrosserie, en entendant sa réponse ridicule, digne d’un petit complètement inexpérimenté. Mais pendant qu’il faisait mumuse avec les flics, j’essayais de pirater la serrure grâce à ma sonde électromagnétique. J’entendais cette voix, celle de ce petit guetteur qui ressemblait à celle de nombreuses autres, enfouies dans la mégapole. Il devait être pauvre et faire ce métier pour nourrir sa sœur ou je ne sais quoi, qui vivent sans aucun doute dans des détruits, c’est toujours comme ça de toute façon. Moi j’avais encore de la chance de vivre dans une boîte du 150ème étage d’un immeuble non loin du centre, mais cette pauvreté qui s’est accumulée était à cause de la politique en place, il faut pas se leurrer, plus c’est gros, plus ç’est difficile à gérer. Après que la serrure se déverrouilla, accroupis derrière la voiture, j’attendais que les flics laissèrent tranquille le petit. Je le voyais suer à grosses gouttes avec son sourire gêné et que tout le monde pourrait deviner qu’il était entrain de collaborer avec un voleur de zotéro… mais bon, on a eu de la chance sur ce coup là .
-Tu me paie quand ? Hein dis ?!
Il me lâchait pas la grappe,
-Laisse moi, on se connaît pas.
Il avait raison, je ne l’avais pas payé. Ca me faisait surtout chier, et je prenais comme excuse qu’il m’avait faillis me faire attraper à cause de sa phrase toute pourrie de ce soir là .
Puisqu’il continuait Ă me crier dans les oreilles et qu’il commençait Ă s’énerver, je lui lança un coup de poing dans la figure, ce qu’il le propulsa sur le mur de la rue. Quelques regards s’arrĂŞtèrent dans notre direction, des regards apeurĂ©s ou mĂ©prisants. En soupirant, je continua mon chemin en courant, avant que quelqu’un appelle la police.
Après le travail, j’enchaĂ®ne la nuit avec des jeunes venant du rĂ©seau bien connu de criminalitĂ© de MĂ©gatopia pour sillonner les rues en recherche de couples, de familles ou sans-abris pour les dĂ©valiser et ceux qui Ă©taient dure de la feuille, on les Ă©liminait avec des battes en fer. On se faisait pas beaucoup sur ces coups-lĂ , les cartes de crĂ©dit n’existaient plus depuis longtemps et tout se faisait avec les yeux, mes autres compatriotes les arrachaient mais moi je pouvais pas, c’est trop dĂ©gueulasse. Mais si l’une des victimes avait des montres ou des bijoux, lĂ on pouvait facilement se faire 100 millions en une nuit. Revendre tout ce qu’on avait volĂ© Ă©tait une autre paire de manches, il fallait surtout trouver des gens assez bĂŞtes pour les acheter. Sinon, on les vendait sur internet, dans le deep web, qui a su se maintenir jusqu’à nos jours, ce site marche pas assez bien. On va pas se mentir, si mes activitĂ©s me rapportaient plus, je sortirais de ma petite boĂ®te du 150ème Ă©tage.
Au petit matin, généralement vers Polaska (oui, les heures ont changé et cela équivaut à 4 heure du matin dans l’ère de la période verte). Quand je rentre, je me fais plaisir devant une bonne série TV et quand mes paupières sont fatiguées, je ferme les rideaux quand le soleil se pointe et commence à briller sur Mégatopia.
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