ROC TREDUDON

ROC TREDUDON.  

Extirper l’histoire et la langue d’un peuple,
c’est annihiler une identité,
c’est procéder à un génocide culturel.

Au cœur du roc montagneux
Dans l’air humide et venteux
Dans la nuit de la lande sombre
Un mirador dressé dans l’ombre
De la lune balafre le croissant
Sur le troupeau bâton menaçant
Brandi sur le dos de la Bretagne
Presque réduit à l’état de bagne
Baigné par l’onde ce pays vieux
Ploie l’échine sous l’onde des cieux
Culture à clore
Ploucs en folklore
Paris exhibé
Province exilée
Copiant sa tour
Sans un détour
Cette Babel cette tour de ferraille
C’est une marque de Paris
Ce pylône bien équarri
Tout en boulons et en poutres de rail
Bretons mes frères réveillez vous
Au langage libéré prêtez l’oreille
L’oreille qui depuis des siècles sommeille
Ne se berçant qu’au son du biniou
Dans un grondement de tonnerre
Quoi révolte spasme soubresaut
La Bretagne s’éveille au berceau
Arrachant ce long dard de fer
Arme de l’impérialisme et véhicule
Tuant la culture par le brouillage
Dissimulé sous divers maquillages
Pissant son mépris au pied de l’édicule
Breton entend enfin le signal
Sur le roc la voix fielleuse s ‘est tue
Sur cette terre bretonne têtue
S’enfle un cataclysme matinal
Mais ce travailleur exploité deux fois
N’a rien compris et ne peut plus même
Exploité par sa télé il l’aime
On le veut Français par acte de foi
Sous-produit lui il produit des excédents
Loin de ces temples de la consommation
Il obéit néanmoins aux sommations
A la liberté éternelle accédant
De l’Ile Longue à Coëtquidan
L’occupant étale ses forces et ses cibles
De ses grosses têtes jusqu’aux submersibles
Inutile l’armée est sur les dents
A quoi bon Breton rime avec dindon
Et Français francs contre rime avec colon
Dévots ennemis en mutuel pardon
Condamnant leurs frères à l’unisson
Criant tous à la trahison
Les pommes de terre pour les cochons
Et les épluchures pour les Bretons
Comme le dit bien le dicton
En soufflant ainsi du biniou le son
On attise le feu de l’explosion

1974

© 2004 NULLART vs. Kinka – ” 1968, une révolution poétique “