Categories
Literature

Découverte intime

D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours rêvé. Pas seulement lors du sommeil, en règle générale, je passe mon temps à rêver, à imaginer obtenir des choses inaccessibles. 

 

Au début, mes intentions étaient puériles, l’âge détermine nos envies. 

Je voulais être riche, devenir célèbre, avoir des pouvoirs ou être un aventurier ; mais avec le temps, j’ai vraisemblablement gagné en sagesse et mes envies ont évolué. 

Je voulais avoir une vraie passion, pouvoir en vivre, obtenir un physique qui me satisfasse, améliorer mes connaissances, mes aptitudes cognitives, comprendre les autres mais quelque chose m’anime encore plus, quelque chose que je ne soupçonnais pas, quelque chose qui est au fond de moi depuis tant d’années. 

Ce dont je rêve par-dessus tout, c’est l’amour. 

 

Je ne sais pas comment cela m’est venu, mais quand je m’en suis rendu compte, c’était déjà ancré en moi depuis un moment. 

Dans mes scénarios quotidiens, j’entretien une longue relation depuis des années déjà, une relation épanouissante et puissante, pleine de tendresse et de bonté. 

Parfois, bien sûr, il peut y avoir des désaccords mais nous finissons toujours par nous dire que d’autres choses sont plus importantes que de savoir qui a raison ou non. 

Je ne rêve pas de désir, quand je m’isole, j’attends que ses bras m’enlacent, j’attends de sentir sa présence apaisante contre moi, j’attends de sentir son parfum enivrant, l’odeur de ses cheveux, j’attends la douceur de ses mains dans les miennes, celle de ses lèvres contre les miennes, j’attends de plonger mon regard sombre s’éclaircissant dans le sien, si pur, si profond et si complexe, j’attends que sa voix me parvienne, que ses mots me nourrissent, j’attends de pouvoir répondre à ses attentes, j’attends de pouvoir poser ma tête contre elle quand elle passe sa main dans mes cheveux, j’attends de pouvoir fermer les yeux sereinement ; pour une fois. 

Quand elle décide de m’embrasser, c’est comme si elle le faisait pour la première fois à chaque nouvelle fois, elle le fait d’elle-même, je me fais surprendre. 

Quand elle me vole ce baiser, je sens mon coeur battre si fort, si vite, comme si ma poitrine bougeait frénétiquement au rythme de ses battements, je ne peux fermer les yeux devant une surprise si grande, je me sens rougir, trembler, des larmes s’échappent et quand elle s’éloigne, je ne suis plus rien, mon corps me lâche, je ne sens plus mes muscles et sans  m’en rendre compte, je suis au sol, genou à terre devant elle. 

Au moment de relever la tête, je me réveille, j’émerge, je sors de mon rêve, à chaque fois au même moment. 

 

Toutes ses attentions particulières, ce sont mes envies, je ne les vis que dans mes rêves, inconsciemment, je m’interdis de vivre ce rêve en réalité, je crois que par-dessus tout, j’en ai extrêmement peur. 

J’en ai peur car quand je sors de mon rêve, le retour  à la réalité est douloureux, mon cœur se crispe et ma gorge se serre, mes larmes sont proches et je me pose mille questions… 

Ai-je vraiment envie de risquer de trouver ce bonheur un jour pour, peut-être, le voir disparaître un autre ? 

Serais-je capable d’encaisser cette souffrance ? 

Cette femme pourra t-elle vraiment m’aimer comme je l’aimerai ? 

Suis-je tout simplement la personne avec qui cette femme voudra passer du temps ? 

 

J’ai peur que tout cela ne reste éternellement un rêve, mais j’ai tout autant peur qu’il ne devienne réalité. 

Je suis certain que cet amour, si pur, si simple, ne s’obtient pas sans y contribuer, mais je ne sais pas quoi faire pour l’attirer et même si je le savais, je ne pense pas qu’une telle personne ne puisse s’intéresser à moi. 

Alors je me plonge perpétuellement dans ce rêve sans fin qui m’apaise un moment avant de me faire continuellement souffrir. 

Je ne sais même pas  à quoi ressemble cette femme, je n’ai aucune image, je ne vois pas son visage ni rien d’autre, je ressens juste ses intentions, ses attentions à mon égard et cela me suffit pour le moment. 

 

Je ne sais même pas si cet amour est possible autrement qu’en rêve alors je désespère, chaque jour, me disant que de toute manière, si il pouvait exister, je n’y goûterais pas de toute manière. 

Je ne pense pas me victimiser en me  disant ceci, j’essaie juste de faire un bilan, une introspection, et je ne vois aucun intérêt de s’attacher à moi plus qu’un ami. 

Je n’ai aucune passion, je n’ai pas de talent particulier, je suis simplement profondément gentil mais la gentillesse n’est pas qu’une qualité malheureusement. 

Je suis fragile, plutôt faible, sensible et perturbé par la noirceur. 

 

Je ne sais pas depuis combien d’années je vis cette relation sans la vivre, mais depuis la première fois où j’ai quitté ce rêve, je n’ai plus l’impression d’être totalement vivant. 

 

Mon passé me hante, il m’obsède et il me manque à la fois. 

Je n’avais pas autant de recul sur les choses avant, mais je ne voyais pas les choses d’un si mauvais côté. 

Aujourd’hui, comment pourrais-je trouver, goûter ou vivre le bonheur, quand j’ai l’impression de ne pas y avoir le droit, quand je me refuse à lui de peur de trop souffrir ? 

 

Ces questions hantent mon quotidien et nourrissent ma dépression. 

Je ne veux pas, je ne veux plus vivre ainsi, mais la mort me terrifie. 

Je ne veux plus avoir à faire à ces pensées, à ces rêves, mais mon cerveau ne veut pas s’arrêter  de fonctionner. 

Je ne veux plus souffrir mais j’ai peur  d’être heureux. 

Tous ces paradoxes m’épuisent et je ne trouve aucune solution. 

 

Vous imaginez-vous souffrir de cette manière depuis plus de vingt ans ? 

Sans jamais rien dire à personne, sans jamais réussir à expulser ce mal-être, cette souffrance, cette noirceur, cette colère, ces larmes qui ne veulent plus couler et toute cette douleur qui ne veut pas me quitter. 

Cette douleur, si présente, si pesante, elle m’accable et me submerge, elle m’effraie, elle me dirige… 

Quand elle est trop intense, elle se transforme en violence que j’ai pour habitude de diriger envers moi-même, afin que mes soucis ne viennent pas empiéter la vie des personnes qui m’entourent. 

Je ne suis pas encore prêt à vous dévoiler ce que j’ai pu m’infliger afin de faire  taire toutes ses émotions si fortes, ses sentiments inachevés et cette douleur incessante. 

J’avais pourtant écrit ce texte dans le but ultime d’y parvenir mais rien ne vient, je ne veux pas embêter les autres avec mes problèmes internes, je ne veux pas qu’on ait pitié de moi  je veux juste que tout s’arrête, je veux tout expulser, par n’importe quel moyen…

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

This site is protected by reCAPTCHA and the Google Privacy Policy and Terms of Service apply.