Sur la cheminée, je remarquais un vase d’Arabie qui avait accumulé de la poussière. Et alors que j’en retirais une partie, elle me lança un sourire timide et hors du temps.
Mon sang ne fit qu’un tour, et je me mis à imaginer les cantiques implorants s’acquitter du joug de la lumière. Mes yeux de hangar plissèrent sous le poids d’une chair de laine, et ses pommettes saillantes sur teint mat me rappelèrent les vieux romans jaunis de Provence.
Je me mis à envisager l’impossible. Ses lèvres de bonheur qui embrasseraient la mer. Son charisme d’espagnole au pied d’un éventail, et ses bracelets s’agitant comme des turbines nucléaires.
Mon âme fantomatique tourna le dos aux turpitudes sempiternelles. Je remontai alors le sens de l’histoire et me retrouvai dans un vaisseau intemporel qui faisait fi de tous mes souvenirs castrateurs.
Les tambours d’Afrique n’y pourraient rien. Les incantations d’Amazonie non plus. Pas même le phosphore blanc des armées jéhoviennes. Il n’y avait là plus que le cliquetis de l’éclosion finale et de la fin des temps.
Comment pourrait-on jamais la tromper ? Laquelle parmi ma douceur ou ma colère voudrais-elle mettre à son service ? Et qui pourrait se lasser du reflet pâle de ses yeux, dans lequel les bateaux ivres s’encastrent d’amour et de frustration ?
Son emprise sur le monde ne devait avoir aucun effet sur moi. Mais le talisman qu’elle cachait sous ses draps de métal m’avait lancé un misérable sort. A moi, et à tous les condamnés qui attendaient en vain sa permission divine.
La porte s’ouvrit, et son sourire de pissenlit disparut dans le fin fond des songes que la plupart des hommes ne concrétiseront jamais.