LE TEMPS S’ARRÊTE…
Que se passe-t-il donc ? Le ciel est toujours bleu mais la luminosité a considérablement diminué. Ce 14 juillet, en plein milieu d’un bel après-midi, une certaine fraîcheur s’insinue. Dans la demeure de ma grand-mère où je passe quelques jours en vacances à la campagne, la belle comtoise que j’ai remontée ce matin même, peine à égrener ses TIC qui bizarrement doivent patienter pour qu’arrivent les TAC. Elle marque 14 heures et 12 minutes. Un coup d’œil vers ma grand-mère qui somnole devant sa télé. Surprendre ! L’écran est occupé par un défilement de lignes scintillantes sur un fond de grésillement. Par quelle association d’idées, cela me donne envie de vérifier sur la tablette que j’avais apportée. Même constat. Le défilement ralentit très progressivement et les lignes s’espacent. Pas plus que la télécommande, les touches du clavier ne répondent pas. L’affichage numérique du radioréveil posé sur le chevet semble hésiter à chaque changement de seconde, ce qui prend un certain temps.
Me sentant très lourd, je gagne le seuil de la maison. Le soleil a parcouru un bel arc de cercle dans le ciel, ce qu’il lui fait habituellement en plus d’une heure et pourtant horloge, réveil, tablette et même ma montre affiche tout juste 14 heures et 35 minutes. On dirait que le crépuscule arrive et il fait presque froid. Le disque solaire n’est pourtant pas occulté par une éclipse. Dans cette campagne où il ne reste que peu d’oiseaux, j’ai la surprise d’en voir certains battre désespérément des ailes puis s’immobiliser en l’air. Arrivant de l’Ouest, deux chasseurs bombardiers Rafale qui d’habitude nous survolent dans un bruit assourdissant, se traînent au niveau de la cime des sapins, dans un étrange ronronnement de gros matous. Tout cela est-il réel ou serait-ce des mirages ?
J’ai de plus en plus de peine à me déplacer et même à penser. Mon cerveau aussi ralentit ainsi que tous mes sens. Je parviens cependant à percevoir une inquiétante modification de l’environnement. A 5km de là, un énorme panache s’échappe de la tour de réfrigération de la centrale nucléaire. Le système de refroidissement doit lui aussi dérailler. On va à la catastrophe… Je voudrais crier mais aucun son ne sort de ma bouche. De plus en plus faible, l’esprit confus, rythme cardiaque et respiration de plus en plus lents, je m’écroule comme dans un ralenti et je sens que jeee m’en… dorrrs.
Soudain, réveil brutal après cette amnésie temporaire. Affalé devant le seuil, je cuis littéralement sous les rayons ardents du soleil au zénith. Les oiseaux pépient et volent au-dessus des toits, les feuilles frémissent et bruissent, la centrale nucléaire n’a pas encore explosé. Vers l’est, j’entends le bruit assourdissant de deux chasseurs qui disparaissent à l’horizon.
Je rentre dans la cuisine car grand-mère est ponctuelle sur l’horaire des repas. Bizarrement, je n’ai pas faim. Je vois que les horloges ont recommencé à rythmer le temps. Et tout m’est revenu en mémoire…
Au journal télévisé de 13 heures que nous suivons tout en mangeant, un flash spécial nous apprend que le Grand Maître du Temps Universel, le bon vieux Chronos, qui veillait en permanence depuis quelques siècles, a fait une sieste imprévisible puisque inédite, au moment où il aurait dû remonter le gros boulet de fonte de l’horloge universelle dont tout dépend dans notre monde truffé de technologie. Ce qui l’a réveillé, c’est le complet, inhabituel et même inédit silence du monde. Retrouvant ses esprits, il vient donc de remonter précipitamment la Grand chronomètre mais un peu plus que de mesure.
C’est pourquoi l’Univers a rajeuni de plus de 3 heures ce jour là. Autant de vacances en plus ! Donc attendons une autre fois pour voir les effets qu’aurait la dilation/contraction de l’espace-temps évoquée dans les théories de la physique relativiste.
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