Une belle soirée de juin, dans la luxueuse propriété d’un ami avionneur, “le Grand”, ex-Premier Ministre et futur candidat à la magistrature suprême, se retrouvait dans une situation pour le moins délicate. Alors qu’il célèbre la conclusion d’un contrat juteux de vente d’armes à l’Arabie Saoudite, une douleur soudaine le prend au ventre.
Pris par la courante, il n’eut d’autre choix que de se refugier derrière des buissons élégamment agencés autour de la piscine, baissant son pantalon dans une scène tragi-comique qui aurait pu faire rire s’il n’était pas si préoccupé par les rétro-commissions qui alimentaient les caisses de son parti.
La soirée battait son plein, rempli de personnalités du show-business, d’hommes d’affaires et de politiciens corrompus, tous plongés dans une ambiance festive où la coke amplifiait les échanges deshinibés. Triés sur le volet, ce petit monde cultivait déjà un « entre-soi rapproché » discret dans les alcôves d’un club libertin renommé de l’ouest parisien.
Les rires et les éclats de voix résonnaient, mais pour le Grand, la fête se transforma en cauchemar. Son fournisseur de cocaïne, organisateur d'”afters” versaillais saupoudrés, vexé par une indélicatesse, coupa la drogue avec un laxatif en représailles.
En apprenant que ses paiements avaient été encaissés sans précaution, le Grand, pris de panique, décida de faire opposition sur ses chèques, déclenchant une série d’événements chaotiques :
Les belles d’un soir, vêtues de robes de haute couture, se vautraient dans une panique nauséabonde, leurs intestins dérangés par la drogue altérée. Les artistes du show-biz, les hommes d’affaires et les politiciens corrompus, tous se retrouvaient piégés dans une spirale de désespoir, à l’image d’une République aux fondements vermoulus s’effondrant sur elle-même. Le Grand, en proie à une colère noire, se frayait un chemin à travers “le bruit et les odeurs” de la foule, cherchant à comprendre comment il avait pu en arriver là…
Pendant ce temps, dans l’ombre de son bureau enfumé de volutes bleutées, Colbert, ministre discret à la probité reconnue, attaché au service du public songeait à ses propres déboires. Témoin éloigné des “affaires” néanmoins bien informé, il accumulait consciencieusement des dossiers compromettants dans son coffre ministériel.
Un de plus sur la pile donc…
Bien qu’animé par des intentions nobles, il était conscient des dérives mafieuses qui gangrenaient le pouvoir. Les informations qu’il avait recueillies sur les rétro-commissions et les malversations au sein des gouvernements auxquels il avait participé, le hantaient. Colbert savait qu’il devait agir, mais il était également conscient des dangers qui l’entouraient. Il attendait son heure, ses dossiers constituant son assurance-vie, pensait-il.
Mais le Grand, furieux de voir Colbert en position de force dans le gouvernement de son rival, cherchait un plan pour le faire taire. Il savait que Colbert était un homme intégré, mais il était forcément vulnérable. il lui fallait trouver la faille et nuire à sa réputation.
C’est alors qu’Hector Tournante, un véritable promoteur, entre en scène. Profitant de l’amitié d’enfance de leurs épouses, il se rapproche de Colbert et lui fit acheter un terrain pour y édifier la résidence secondaire idéale de sa femme du côté de Ramatuuelle. Problème : ce terrain avait déjà été vendu par Tournante à des promoteurs normands, et l’acte authentique non enregistré par un notaire plus que lacunaire. Hector, paré dans son sentiment d’impunité affiché par la rosette fièrement portée au revers de sa veste, n’en avait guéri. l’homme de réseaux à l’entregent soigneusement cultivé connaissait les arcanes du pouvoir, l’écume qu’on sert aux citoyens aux journaux télévisés et la profondeur des “conversations d’adultes” réservées aux initiés. Avec Troybises et Pastaga, “Fernandel de l’anisette”, il a su comment manipuler les situations à son avantage.
Il menaça donc Colbert de révéler leurs échanges épistolaires, le mouillant systématiquement s’il ne lui accordait pas les permis de construire nécessaires au blanchiment du trafic de son associé suisse allemand, et s’il ne l’aidait pas à sortir du mauvais pas d ‘une enquête diligentée contre lui.
Colbert, comprenant d’où venait l’intrigue et réalisant qu’il était piégé, menaça imprudemment publiquement de riposter lors d’une émission radiodiffusée :
« j’ai été exemplaire et peut-être plus encore que vous ne pouvez l’imaginer, car il y a des choses que je ne peux pas dire ici… »
A ces motes pris de panique le réseau du Grand tout comme celui de son rival en responsabilité, soutenu par l’État profondément corrompu des infiltrés de Troybises, ne tarda pas à se mettre en branle. Suite à un acte de violence calculé qui a « malencontreusement » dérapé, Colbert fut retrouvé battu à mort déposé dans un étang peu profond, son meurtre à la haine maquillé en suicide. Les médias, sous l’influence du réseau du Grand aidé d’un Procureur général barbouze, relayèrent la version officielle, tandis que les murmures de la vérité commençaient à se faire entendre dans les couloirs du pouvoir.
La soirée de l’avionneur, qui avait commencé dans l’euphorie, se transforme en un tableau de désespoir et de trahison. Le Grand, bien que soulagé d’avoir éliminé une menace, savait que le prix à payer pour son ascension au pouvoir était lourd. Dans les coulisses de la République, les secrets et les “défonces” récréatives se mêlaient, tissant une toile d’intrigues où chacun était à la fois prédateur et proie.
Quelques années plus tard alors que le pouvoir changea de camp, la famille entière d’un inspecteur de Police fut massacrée lors d’une nuit de tuerie provençale qui défraya la chronique…
Les jours passèrent, et le Grand continua à naviguer dans ce monde de corruption. Il s’appuyait sur ses fidèles Troybises et Pastaga qui s’occupaient du financement occulte et du service d’ordre du parti. Pour le reste,
« Business as usual », seuls les bénéficiaires des comptes à numéro ont changé à la faveur du résultat des élections.
Bientôt cinquante années plus tard, beaucoup des témoins de la soirée fatidique ont disparu de mort naturelle, en exil sud américain ou plus ou moins mystérieusement. Et les journalistes, curieux de la vérité, se heurtent plus que jamais à l’immuable « secret défonce » alors que la lutte contre le narco-trafic est devenue une priorité nationale.
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