La nature se réveillait lentement.
Allongée sur le dos, pensive, Shania se laissait bercer par les premiers chants printaniers.
Elle se détendait et oubliait, le temps de cette baignade matinale, les atrocités qui hantaient ses nuits.
Elle n’avait plus connu un sommeil apaisant et réparateur depuis bien trop longtemps. Depuis cette horrible journée qui vit la destruction de son village et le meurtre atroce de ses parents alors qu’elle n’était âgée de 5 ans seulement.
Chaque nuit elle revoyait son père brûlé vif, cloué sur une croix faite de bois, elle entendait le cri de sa mère prise de force, avant d’avoir la tête tranchée parses tortionnaires.
Chaque nuit elle entendait ces cris d’enfants qu’on égorge, ces cris de femmes qu’on violente, ces cris atroces des villageois en proie aux flammes.
Cette voix terrifiante et ces rires démoniaques.
Oui, ces sons effroyables, ces odeurs nauséabondes de chairs brûlées, ces visages meurtris par une souffrance inhumaine ne cessaient de tourmenter ses rêves.
Un immense trouble, mélange de haine, de colère et de chagrin s’emparait d’elle, des larmes perlaient au bord de ses yeux.
Seuls la fraîcheur de l’aube, le calme matinal, la solitude et ce lac qui la menait aux gré de ses caprices, la délassaient et apaisaient ne serait-ce que quelques heures son esprit souffrant par un douloureux passé.
Elle plongeait et replongeait, jusqu’à atteindre la cascade et se laissait entièrement subjuguer par les caresses des gouttelettes sur son corps nu, ses seins, le long de son dos jusqu’au bas de ses reins.
Quelle agréable sensation. Elle frissonnait, non de froid mais de plaisir.
Elle resta un long moment, ainsi, immobile, puis, se laissa glisser doucement dans l’eau fraîche et après quelques brasses, regagna la rive.
Elle s’allongea sur l’herbe encore humide de rosée, ferma les yeux et se laissa envahir par les premiers frémissements de vie printanière, les chants enivrants et apaisants des oiseaux, les arbres qui n’en finissaient pas de s’étirer comme pour sortir de l’hiver et la fraîcheur du jour naissant.
Elle s’endormit. Les heures passèrent.
Soudain, une voix, masculine et douce, la sortie de ses songes.
— Encore ce cauchemar princesse.
Elle ouvrit les yeux, sans aucune pudeur, se leva face à cet homme, âgé d’une soixantaine d’année environ.
— Oui.
Il enveloppa son corps d’un kimono de soie verte. Silencieux, il ne l’interrogerait pas.
— Et si on allait croiser le fer.
La jeune fille sourit.
— Avec plaisir.
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