Des VIES à FLEUR de PEAU
Recueil de Claude DUSSERT
2025
PEUR PRIMALE
Tout recroquevillé en position fœtale
L’enfant, ratatiné, exhalait sa douleur.
Sous des pas inconnus, l’escalier gémissait,
Pleurait des souvenirs, murmurait des sentences
Les murs suintaient des larmes de silence,
D’amères déconvenues. Il fallait en finir.
Sur ses doigts il sentait leurs larmes de dégout
Qui maculaient ses mains et giclaient dans l’espace.
Le plafond vacillait, allait tomber sur lui
Il voulait déguerpir mais des liens l’attachaient.
Des lueurs blanches et crues inondaient la chambrée
Il était temps de fuir, mais où se réfugier…
Les vécés du premier, la grande bibliothèque ?
Il avait mal aux bras, ses jambes ankylosées
Refusaient de porter son corps martyrisé
Il ressentait une douleur sombre, immense.
Mais où était sa mère, elle devait le chercher !
Dans sa main il serrait une médaille émaillée
Qu’elle lui avait glissée, action prémonitoire ;
Il allait mourir, c’était sa certitude.
Tout à coup un éclair illumina l’espace
Traversa ses paupières. Le temps était venu
De sortir du lit et faire sa toilette.
Escale liminaire au cœur du pensionnat.
1
ÉNIGME
Des yeux perdus dans le noir
Clignent des cils pour percer le mystère
Mystère pour voir dans le noir
Comme au grand jour
Mystère de l’alchimie et de l’arithmétique
Nombres premiers qui s’entrechoquent
Dans un cerveau de pierre hermétique.
Je calcule sur la ligne horizon
La racine carrée du QI des hommes
Qui n’en sont pas à leur premier essai
Pour percer ce mystère.
Einstein est mort
Théoriquement
Mais relativement, il vit encor
Sans savoir où il va
Il détruira le monde c’est sûr.
Nobel
N’a jamais su tirer la langue
Ou faire un pied de nez
Sa bombe n’est pas glacée
Mais nous glace le sang.
L’équation n’a plus de sens
Il n’y a plus d’inconnue
Seuls,
Des yeux perdus dans le noir
Clignent des cils pour percer le mystère.
2
RECONSTRUCTION
J’ai croisé des regards bouleversés
Bouleversants.
Dans les yeux d’un enfant
Assis à l’entre-deux frontière
J’ai vu des éclairs de feu
Et des éclats de larmes.
Ses mains déjà ridées
Traçaient des sillons d’espoir ;
Ses doigts fébriles aux ongles écorchés
Fouillaient dans un cratère
En quête d’un crouton, d’une miette
À se mettre sous la dent.
Sur son dos écorché
Par des éclats de pierres
Brisé de solitude, d’abandon
Des haillons lacérés
Raides du sang séché
De sa mère éventrée
Lui donnait une allure
De pantin décharné.
Le regard dans le vague
Cherche
À en perdre la vue
Un signe de survivance.
Mais, où est la frontière ?
Le toit de la maison
Dégouline de tuiles
Un volet dégondé
Crisse des au-revoir
A se mordre les dents.
Sur un pan de mur
Fissuré de laideur
Le soleil imprime
Dans un halo de peine
La fureur des combats.
L’avenir devra se retrousser les manches !
Un jour
Il sera temps.
DES ÉLANS de COLÈRE
La colère projette des flèches enflammées
à se brûler les ailes…
La vie prend bien souvent racine dans la mort
Au moment où la nuit mange en catimini
Le soir du dernier jour…
Dans la plaine d’Ukraine les cratères des bombes
Éjaculent des avalanches de lave et de pierres.
Les continents dérivent à ne savoir où aller.
Les frontières se laissent peu à peu emporter
Traçant des failles d’infinie solitude.
Les peuples rugissants s’éloignent des origines
Se provoquent en duel de guerres fratricides
Et se croient légitimes d’immoler leurs prochains
Au motif qu’ils croient en d’infinies tendresses.
POUR un FOULARD PERDU
Le carcan qui la blesse
lui tient lieu de corole
Chaque jour ils accouchent
du même protocole ;
Dans un sarcophage de sable
son corps est enterré
Ils ramassent des pierres brûlantes
pour la lapider.
Sa tête est maintenant une plaie géante
Ils ? Ce sont eux, les mollahs,
elle n’est qu’une simple étudiante.
Elle doit être immolée
car elle a blasphémé.
Vous ! Vous fermez les yeux
sur son foulard volé
Par un vent d’hiver mauvais
qui venait à passer.
Mais pour tous les caciques
qui peuplent ce pays
Pour défaut de foulard
elle doit être punie
Elle ne mérite plus
ils lui volent sa vie.
Les RENÉGATS du TEMPS
Ils ont dans la mémoire des trous de connaissance
Et prônent trop souvent la désobéissance
De vessie ou lanterne ils ne connaissent sens !
Ils éructent des non-dits remplis de fièvre aphteuse
Ils crachent des gros mots comme glaviots catarrheux
Ils méprisent l’Espèce et dégenrent les races
Ils écrivent des mots qui ne laisseront trace.
Ils radotent l’histoire, confondent les passions
De leur sens érotique avec affectation.
Ce sont des mécréants emplis de nihilisme
qui vivent calfeutrés dans leurs pensers intimes.
La haine est leur venin, ils prônent la torture
Ils agissent à outrance sans commune mesure.
Ils bafouent la grammaire et nous traitent d’ignares
Exècrent la tendresse, se réclament barbares.
Si tu n’as pas de barbe tu es de suite genré
Et quand ils nous dérangent ils se croient singuliers.
Comme si poil au menton donnait l’intelligence
Cachait de leurs propos des stères d’indigence.
Ils sont si négligents et si peu attentifs
Qu’ils se nomment nouveaux mais sont peu créatifs ;
Se prennent au filet du dénuement mental
Ils bafouillent, tritouillent et trouvent ça normal.
Ils donnent priorité à ‘ langue artificielle’.
Ils créent des barbarismes qu’ils disent naturels
Et leur bêtise innée, recrée les manuels.
7
Demain tous ces censeurs se verront défroqués
Par des identités imprimées du Cosmos
Afin de les parquer dans la non existence
En langage basic.
HAÏR la GUERRE
À subir le passage des convois
l’herbe se cache en terre.
Le ciel a des éclats qui déchirent les nuages ;
Seuls les pleurs des enfants
et des mères isolées
font office ici de perles de rosée.
Quand les cœurs éclatés
des mères trucidées
ne coulent plus que de larmes de sang.
Quand les mômes sont dévissés
du sein maternel
il faut haïr la guerre.
Quand l’aurore se déchire
à l’aube d’un nouveau jour
et qu’un bouquet de bombes
éclaire les tranchées ;
que des pères angoissés, frigorifiés de gel
écoutent terrifiés le vent
qui colporte des œillades croisées, indifférentes.
Quant aux supplices des fracas
D’obus en multitudes
se mêlent le vol des oiseaux de passage
qui ont des regard
pas tout à fait différents
de celui des enfants.
Il faut haïr la guerre.
ENCALMINÉS
Cela fait quatre jours qu’ils se sont englués
Dans ce que les marins appellent pot-au-noir ;
Toutes voiles dehors les mâts sont décargués
Le grand trois-mâts dérive selon l’humeur des flots.
La brise est tombée sur l’immense océan
Ils sont las de barrer de nuit comme de jour
Ils n’ont rien de Noé qui bravait le déluge.
Ils sont encalminés sur la nappe géante
Ils n’ont rien de Jonas avalé corps et biens
Ce sont des régatiers empoicrés au grand large.
Leur souffle ne suffit plus à gonfler la grand-voile !
Ils prient l’esprit du vent
Ils supplient à genou l’âme des disparus
Qui avant de périr au nez des garde-côtes
Avaient largué les voiles pour s’extirper enfin
De cet enfer sans vent
Exhortant la tempête à prendre les devants.
C’étaient des négriers ou des marchands d’esclaves
Que le Dieu des enfers avait encanaillés
Des écumeurs de mer
Des violeurs de Sirènes
Des boucaniers du Diable
Des princes de Satan.
Ils n’avaient qu’un mérite, celui d’être armé ;
Mais les canons du Diable n’ont pas fait taire l’histoire.
Quand des cales putrides monte un grand cri d’espoir
Prenez bien garde à vous corsaires de pacotille
Que s’inverse le temps et qu’il tourne à l’envers
Que tous ces encagés ne s’en prennent à vous
Et remettent à l’endroit vos droits et vos devoirs.
EN KANAKIE
Ils incendient la ville à coups de lance flammes
Ils brûlent les voitures de leurs voisins haïs
Ils pillent les quartiers trop beaux à leur regard
Ils dépavent les routes, dressent des barrages.
Ils nous disent arrogants, qu’ils sont le peuple élu
Ils taguent sur les murs des slogans de misère
Ils brisent les carreaux à coups de lance pierre
Ils se croient courageux en bandes organisées.
Ce sont des pauvres types, jean-foutres assoiffés
Envieux de tous ceux qui triment pour gagner
Le respect et la joie d’être heureux et en paix.
Ils crient à perdre haleine leur enfance perdue
Butés de certitudes, ils flinguent l’espérance.
Ils ne supportent pas ceux qui se disent heureux
De profiter enfin d’une vie de labeur
Ils détruisent leur île se croyant des guerriers
Exècrent leur pays dont ils sont prisonniers.
COMPLAINTE
Le Graal ne se gagne que par des forfaitures
Si tu veux conquérir la coupe du vainqueur
C’est par des manigances et des caricatures
Que la gloire de régner comblera ton bonheur.
De jaloux bavardages, martyrisent ses rêves
Ces rêves qu’il se crée pour éviter l’ennui
Empoisonnant sa vie sans lui laisser de trêve
Entretenant sa peur au phénix de sa vie.
De nouveaux Attila voient le jour en cascade
Lui prédisent des jours de grande incertitude
Valsent à qui mieux mieux ne sont que des arcanes
Tortueux, patentés, qui la foule emboucane.
Acolytes jetables aux propos chichiteux
Ils entassent pêle-mêle les lois et les décrets
Nos esgourdes s’enlisent dans leurs propos oiseux
Ils conspirent, traficotent sous le sceau des secrets.
À vouloir trop flirter avec les étoiles
Jupiter je vous dis peut en prendre ombrage.
Aux jeunes prétentieux et sans cérémonial
Il peut faire croche-pied, foin de son caquetage.
Il vous l’avoue tout net, en a souvent sa claque
L’idée lui vient souvent de déserter la place
Car il sait qu’Il nous mène droit dans un cul de sac
Mais que voulez-vous donc ? Qu’enfin On me remplace !
Egroter : Discuter sur des futilités
PLUS de QUARTIER
Car ils ont l’inculture ancrée dans leur mémoire
Ils ignorent l’histoire et n’ont que peu d’espoir
De voir leurs quartiers et leur faune migratoire
Accéder c’est certain au seuil du purgatoire.
Parfois abandonnées les mères se désespèrent
Souvent embrigadées ce ne sont que commères
Aux comportements flous et à l’instinct grégaire
Grandies à la va vite à l’ombre délétère
De tyrans de banlieue loin d’être débonnaires.
Ils dressent des barricades à ne plus voir l’éther
Leur société haït le monde littéraire
Ils se disent mal aimés mais ne sont que sectaires
Vous ne les verrez point aux seuils des presbytères
Car ce sont des vauriens. Qui dira le contraire ?
CRIS d’ARMÉNIE
Il faut vivre du passé pour bâtir l’avenir.
L’esprit et le cœur ont besoin de l’air du large.
Quand La mémoire rebelle
Trébuche sur les pavés du hasard
Aux sources iniques de l’injustice
Faites de larmes et de cris d’innocence
Pour écrire dans le sang des paroles d’espérance.
Il faut alors choisir des rimes de chaleur
À réchauffer même l’indifférence ;
Jeter son dévolu sur des mots qui prennent sens
Qui s’égaient sur des pages blanches torturées
Qui chantent l’espoir à gorges déployées
Faisant fi des souffrances et des atermoiements.
Quand nos aïeux gazés revenaient
Du combat aux tranchées dégoutantes,
L’Arménie condamnée par des Pachas cruels
La tête enrubannée de sadiques chechias
Écrivait son histoire en lettres de sang.
Aux versets sataniques les Arméniens offraient
Des résistances vaines au génocide
Ce monde est-il pleutre et inculte
Jouisseur, fainéant, vulgaire, intolérant
Qu’il ne fait que s’armer pour d’impossibles guerres
Pour exister, se donne une conscience à l’abri de canons?
En ce qui me concerne, je vote pour la paix
Qu’elle soit blanche, noire ou jaune
Mais plus jamais teintée de rouge.
Le GRAND CHOC
La barbarie humaine a créé le néant
Les kibboutz vidés de tous leurs habitants
Pleurent des larmes de ruine désolantes, suprêmes
Le mur des jérémiades a fui Jérusalem.
La riposte a tardé…. Sur Gaza désormais
Tout comme à Jéricho, l’anathème est lancé
Les maisons écroulées vomissent des cadavres.
Les secours s’organisent telle danse macabre.
Les chars dans les rues traquent les taupes humaines
Des tunnels écroulés, véritables abysses
Montent des cris d’horreur des plaintes souterraines
La terre est écœurée recrache des vivants
Les égouts saturés des cadavres vomissent
La guerre n’en est pourtant qu’à son commencement.
CRIS de FEMMES
Le vent tourbillonnait en bourrasques gelées
Des châles de courants d’air balayaient le trottoir
Quand elle s’abrita sous une porte cochère
L’ombre qui la suivait fit halte en même temps.
Elle venait d’échapper à une mort certaine
Et son cœur battait à plus de cent à l’heure.
La nuit devenait noire d’une couleur sépia ;
Il y a juste une heure elle déposait plainte
Dans un commissariat aux odeurs de pieds.
Un scribouillard peinait à aligner les phrases
Qu’elle-même avait du mal à devoir éructer.
La peur dans ses yeux et les lèvres tremblantes
Elle balbutiait des sons difficiles à comprendre.
Le fonctionnaire avait bien d’autres choses en tête
Sa fiancée ce matin l’avait jeté dehors
Car il avait osé lui cracher au visage
Congédié le gros mâle comme un mal élevé
Il pensait que les femmes sont sources d’incurie.
Sur sa chaise, éplorée, elle lui contait la scène
Qui l’avait amené dans cet étroit bureau.
Pensez-bien qu’il avait d’autres chats à fouetter
Il avait le visage tout en papier mâché
Et l’on se doutait bien en voyant sa tourniole
Qu’il buvait trop de vin pour oublier sa vie
Sa vie de mange merde et ses soirées pourries.
L’ombre dans l’encoignure venait de se pencher
Sous la porte cochère la femme doucement
Pleurait sur ses enfants qu’elle avait dus laissés.
Il lui avait souvent redit et répété
Si tu vas voir les flics, c’est sûr, je te tuerai.
C’est par ce soir d’orage qu’il passa à l’action
Deux balles dans le ventre comme un éventrement
La vie de la jeune femme s’enfuit en courant.
Au matin dans la presse, juste un entrefilet
« Drame familial dans le pays nantais. »
Voilà l’histoire quelconque d’une fille suppliciée
Que les flics racontent à longueur de journées.
Les juges, suprême instance, l’ont vite relâché
Un passant sur la place avait cramioté
Il fallait au plus vite, le verbaliser.
ÉCOEUREMENT
À chaque clapotis l’océan nous raconte
Tous les allers-retours qui parsèment sa vie.
Par abus de chiures il se sait condamné
Alors, sa houle parfois dégorge nos ordures
En de traîtres rouleaux il nous dit sa colère
De refaire chaque jour mêmes cheminements.
Les fleuves, les rivières, les rus, les caniveaux,
De fureur gonflés, s’évadent dans les près
Noient routes et sentiers, nous laissent pétrifiés
Présage annoncé, objurgation sans frais.
À détruire le sol, les pâquis, les forêts
Où vivent en harmonie bien d’autres sociétés.
Pour étendre vos biens par votre avidité
Vous désappropriez la gente animale
Arrachez à la flore son droit à nous charmer
Vous bridez les cours d’eau par votre stupidité
Demain les éléments dirigés par Gaïa
Remettront le désordre dans vos propriétés
La Nature , en tout lieu l’emporte sur vos biens.
PROMESSE
Quand l’encre de la plume écrit des bavardages
Ne sait plus nous parler d’amour ou de nature
Imprime à foison l’angoisse, la torture
Pour instruire les enfants dès leur plus tendre âge ;
Que l’espoir des soldats est maculé de terre
Les uniformes tâchés de sueur et de sang
La camarde accrochée à tous leurs vêtements
Enveloppe voisins, parents, amis et frères.
Cloîtrés ou emmurés dans la tranchée profonde
Les oreilles bouchées aux gargouillis de l’eau
Qui frétille gaiement dans le petit ruisseau
Ils vivent, morts-vivants comme dans une tombe.
Le siècle à vingt-cinq-ans mais il en paraît cent
Quand nos pères combattaient les teutons arrogants
C’est au chemin des dames, messieurs et bonnes gens
Qu’une génération a donné tout son sang
Pour abreuver la terre de nouveaux sentiments
Jurer, c’est la dernière, je vous en fais serment
Boutade en vérité car à l’ultime instant
La parole revient toujours aux vrais tyrans.
ACCALMIE
L’espace frissonne d’un écho de silence
Et la morosité sature l’atmosphère.
La brouillasse empègue les fenêtres poisseuses
La tristesse et l’ennui habitent la maison.
À la regarder mieux s’infléchi-t-elle à gauche
Ou sont-ce les volets, qui, montés de guingois
Lui donne cette allure un rien originale ?
Le haut des cheminées n’est pas non plus très droit.
Les rafales de vent, font gémir les carreaux
Entraînant avec eux de poussiéreux nuages
L’humidité de l’air est à son paroxysme.
Le sol crevassé où stagne une eau putride
Ne nous incite guère à faire promenade.
La terre du chemin est encroutée de glace
Que même les chevaux préfèrent leur étable
À brouter de la paille sans rompre le silence
Qui en ces temps troublés, est un vrai agrément.
Les jeux de société paressent sur la table
Les enfants sont moroses entre deux coups de dés
Les adultes façonnent des rêves illusoires.
Les canons se sont tus, mais trêve dérisoire
Les ploucs ne sont pas prêts à user d’accordoir
Pour signer une paix, régler leurs différents
Graver sur parchemin les mots d’un concordat.
Le MONDE se RÉTRÉCIT
Il est des terres arides que rien ne désaltère
Des oasis taries aux dattiers centenaires
Qui ne résonnent plus aux pas des méharis
Qui dessèchent de boire sous le sable, endormies.
Il est des terres meubles inondées par les crues
Des hectares de blé qui n’enfanteront plus
Par la faute des hommes qui ont toujours cru
Pouvoir dompter Nature et qui ont tout perdu.
Il est des terres gelées dans les contrées australes
Eclairées dans la nuit d’aurores boréales
Aux banquises torturées par les rayons solaires
Qui craquent de craquer de lézardes polaires.
Des terres immaculées qui ne résonnent plus
Des grondements sauvages des habitants du cru
Qui assistent ébahis sur des îlots de glace
A la fonte des neiges et tout cela les glacent.
Il est des terres bénies où le ciel et la mer
Accouchent chaque jour sérial hunters *
Qui vivent le présent comme on boit une gnole
D’un seul coup, véritables marioles.
Et si nous devenions un peu plus terre à terre
Afin de protéger toutes les variétés sur terre !
La VIE serait-elle plus belle derrières les Murailles ??
La nuit était vivante
Le sous-bois respirait
Allongé sur sa natte
Il déambulait
Dans tous ses souvenirs.
Il inventoriait
Les dernières intrigues
Les derniers dénouements
Sans cesse rabâchés
En boucle sur les écrans.
C’est dans ces moments-là
Qu’il prenait son grimoire
Et gravait dans la cire
Des pans de son histoire.
L’écriture pour lui était l’arme immortelle
Que seuls les tyrans considèrent mortels.
Depuis près de trois ans
De l’Ukraine à l’Iran
De Russie en Europe
D’Afrique aux antipodes
D’Israël et d’Orient
De l’Inde au Pakistan
Les conflits éclataient
Sur tous les continents.
La plupart des pays
Dans l’Europe assoupie
Se gavaient, jouissaient
De bienfaits méritoires
Mais ronchonnaient sans cesse.
Sur les ondes, dans les rues
Les bistrots, les cafés
Les Français jacassaient
Ils étaient malheureux
D’avoir tous ces bienfaits.
Alors ils défilaient
Bloquaient et saccageaient
Ce que les gens de biens
Leurs avaient octroyés.
Ils voulaient posséder
Encore bien d’avantage
Mais hostile au travail
Il fallait tout donner
Tout réorganiser
Et puis tout chambouler.
Ils se croyaient César
Mais en réalité
N’étaient que de benêts
Voyant chez les despotes
Un vent de liberté.
MON CORPS M’APPARTIENT
Je vous montre mon corps
Je vous livre mon âme
Mais réfléchissez bien !
Savez-vous malheureux
Que sans moi et les autres,
Votre mère
Misère
Vous ne seriez peut-être
Qu’un gamète errant
De Branlette en branlage !
Avait-elle des seins pour vous alimenter
Sainement ?
Votre père avait-il un virus malin
Pour que vous haïssiez
Le corps de vos filles ?
Regardez, admirez la beauté
Dans toute sa nudité
Véritable œuvre d’art
Par Allah façonnée.
Mon corps n’est pas vicié
Il ne transfuse que l’Amour, l’Amitié.
Il ne vous mordra pas !
Je ne suis pas un monstre
Je ne crie pas de rage
Mais je veux simplement
Libérer mes cheveux
Dans le vent.
Derrière mon grillade
Mes yeux sont embués
D’une tristesse infinie
Regardez-moi !
Dans mon corps maltraité
C’est votre enfant
L’avenir de l’Iran
Une fille, votre sang.
25
GOULAGS
L’ennui du temps blessé s’inscrit en filigrane
Sur le front du damné martyrisé d’absence.
L’ennui du temps volé laisse les yeux ouverts
Aux paupières qui se brûlent dans l’attente du jour.
Les sévices gravés au sein de sa mémoire
Faits de froidure glaciale, et de gelures profondes
Lui servent de résilience au creux d’un matelas
D’un lit froid déserté de l’amour d’une femme.
C’est derrière des murs de parpaings et de glace
Que le silence crie l’amère désespérance
Aux hourdages aveugles faits de verre trempé.
Ces mots sont des prières qui cognent aux parois.
Il est ce prisonnier au rictus insolent
Aux prunelles rieuses, au regard angélique
Qui défie les matons ivres de rage vaine.
Sa force, son esprit viennent à bout des tourments.
Il a plu cette nuit des larmes de détresse…
Derrière ses barreaux, il souffre le martyre
Mais il ne dira rien, il a bien trop à dire.
Il y a des silences qui en disent plus long
Qu’un exposé savant ou un discours de guerre.
Pour un simple clin d’œil, un refus de se taire
Une simple fantaisie, une attitude fière
Il est mis au cachot comme démon subversif.
Il y a des pays où dire la vérité
Est passible du bagne jusqu’à perpétuité.
Vive la Liberté.
GAZA
L’année qui se profile, comme la précédente
Va de nouveau planter dans le cœur des enfants
Des épines acérées ou des balles traçantes.
Ils regardent le jour s’extirper du sommeil ;
Dans un concert vibrant de sirènes alarmantes
Tout s’arrête, tout ment et se métamorphose.
L’absence étire le temps, le rend interminable
Seul le murmure des vagues est une chanson sans fin
Une musique douce, véritable refrain.
Des cris inentendus s’évadent des fenêtres
Absorbés par le sable, ils se noient dans l’écume
Le temps enchifrené balaye les rafales.
Le vent qui se parade sur les dunes endeuillées
Affine leurs dentelles au gré des aléas
Chacun à sa manière détaillent les combats.
Les tanks, la mitraille viennent de tous les camps
Mais « S’il est permis de violer l’histoire
Il faut savoir aussi lui faire des enfants »*
- Citation d’Alexandre DUMAS
TSIGANES
Dans la ville, la nuit se défait peu à peu
des bruissements du jour…
Des senteurs de jasmin embaument les beaux quartiers.
Dans des ruelles sombres
la lueur des braseros enfume la musique
de guitares tsiganes…
Compagnes éphémères d’une migration forcée.
l’Europe a ouvert ses frontières mais perdu le sourire
de l’hôte qui reçoit.
Les banjos se veulent guitares véritables…
Des quadrilles se forment
Quand les chansons à boire baissent le pavillon.
Alors, ils dansent sans répit
et jouent à perdre haleine…
Ils sont de ceux qui hantent les foules opprimées
Vous ne les verrez plus lancer leur sombrero…
28
TUNNELS d’INDIFFÉRENCE
Le doute le plus noir n’a ni début ni fin
Ce n’est qu’égarement dans le cerveau humain.
Dans les maudits tunnels l’obscurité assaille
À chaque croisement tapine la gueusaille
Ariane n’a tressé qu’un filet pellucide*.
La lumière des casques est un fil incongru
L’exécration anime l’âme des assaillants
Ils font vœu d’immoler les hordes combattues
Libérer les otages, fuir les éclatements
Des balles, des grenades lancées en tâtonnant.
Dieu avait déserté paradis et tourments
Laissant les hommes agir en tout acharnement.
La Thora, le Coran n’avaient plus aucun sens
Lors, le Moyen-Orient ne vivait que d’outrance
La paix dans ces contrées n’avait la moindre chance
RETOUR
Après tant de détours, après trois ans de guerre
La ville l’accueillait comme pure étrangère.
La maison trônait là, dans la rue ravagée
La toiture effondrée, les cloisons lézardées.
De la terrasse, au loin, l’océan scintillait
Ballotant le bateau qui l’avait ramenée.
Les volets avaient pris la poudre d’escampette
La cheminée gisait et rongeait la moquette.
L’atmosphère étouffait de parfum de poussière
D’épais nuages noirs s’enroulaient dans l’éther ;
Dans sa forge Vulcain frappait, à bout de nerfs
Aux sons de grondements et d’aveuglants éclairs.
Les persiennes closes, diluaient la lumière
La guerre l’avait happée, elle cherchait des repères
Sur des tas de gravats et de lettres intimes
Des souvenirs tenus ou des preuves infimes
De ces années perdues à conspuer la terre
Elle ne se rappelait que le vieux cimetière.
L’atmosphère était lourde en cette fin d’été
Les hirondelles en masse s’apprêtaient à migrer.
Pensive, muette, les deux poings dans les poches
Le cœur au bord de lèvres elle pensait à ses proches.
Après tant de détours, après trois ans de guerre
Il lui fallait fleurir tombes et ossuaires.
PORTER son CŒUR
Porter son cœur en bandoulière
Arpenter les chemins de poussière
Rêver à d’impossibles rêves
Semer l’espoir tout le long de la grève
Transporter des lingots d’amitié
afin que les enfants de toutes les contrées
sous les coups de canon arrêtent de trembler.
Chanter l’hymne à la joie
pour que chacun festoie
Danser sur des parquets
aux lattes bien cirées.
Aimer à perdre la raison
Chercher des rimes à passion
Ouvrir nos cœurs à la raison.
Effacer à la gomme arabique
les effets des combats cathodiques
Chevaucher des comètes joueuses
pour trouver une terre vertueuse.
Chercher la pierre philosophale
Éviter les tirs en rafale
Laisser la déraison aux morfals.
Épouser le silence et le chant des oiseaux
Profiter des couleurs qui irisent les ruisseaux
Effleurer de la main le calice des fleurs
Tisser des liens solides au bonheur
Défier l’intelligence artificielle
Redéfinir les contours de la terre et du ciel
Pour enfin profiter d’un monde providentiel.
CHOISIR
À vouloir posséder tout et n’importe quoi
Entasser des avoirs et le je ne sais quoi
On devient possédé par ces nouvelles choses
L’homme libre devient l’esclave d’overdose.
Il s’arme toujours plus pour protéger ses biens
C’est la roue infernale, un vrai chemin chthonien*
Qui tourne en rond, louvoie, depuis la nuit des temps
Oppose les idées des anciens au présent.
Mon corps avec le temps recherche la distance
Afin de mieux gérer mes jours d’existence
Mes envies de pouvoir se heurtent à la raison
Et font un pied de nez à tous les greluchons.
Même les pharaons ont perdu leur pouvoir
Leurs tombes sans vergognes attisent les pillards
Écumées chaque jour, sans pudeur profanées
Elles sont l’archétype de trésor mal placés.
Le plus beau des trésors se trouve au fond de nous
Dans l’âme, dans le cœur de chacun d’entre nous
Être bien né n’est pas un gage de sagesse
Dans l’esprit de chacun il y a la noblesse.
Choisir ou écarter les prêcheurs malfaisants
C’est le lot de chacun et c’est notre présent
À vouloir jouir de toutes nouvelles choses
L’homme libre devient l’esclave d’overdose.
*Chthonien : invivable
ALEXEÏ
Je me souviens très bien de ce jour transparent
Du soleil estompé de voiles vaporeux.
Les cloches des églises peu à peu s’accordaient
Seul sur le parvis un quidam pleurait.
Dong, dong, dong, dong, dong, dong…
Les passants le lorgnaient, pressés de s’éclipser
Ce n’était qu’une tâche, une incongruité.
Dans ce monde de fou, iconoclaste, pressé,
Nombreux étaient ceux qui voulait l’ignorer
C’était une verrue dans l’atmosphère iodée.
Ils trouvaient des détours pour ne pas l’affronter.
L’homme ? C’était mon père et moi je l’ignorais
Il avait eu l’audace de crier « Liberté »
En ces jours de détresse et de vie confisquée
Les héros sur les doigts pouvaient être comptés.
Les geôles accueillaient leurs espoirs prisonniers
La révolte dans les têtes ne faisait que germer.
Le plancher marmonnait sous leurs pas dérisoires
Des souvenirs feutrés montaient dans leurs mémoires
Les sommiers sans ressort gémissaient des soupirs
Et greffaient des secrets au creux de leur exil.
La neige en Sibérie boit le sang d’Alexeï.
HANTISE
Devant ces guerres infâmes
Je crache ma colère
J’écris des mots comme des vomissures
À la face de ceux
Qui harcèlent les morts.
Soldats en multitude
Tombés au champ d’honneur
Mères démantibulées
Pères démembrés
Fillettes violentées
Fils cadavérés.
Dans un square désolé
Se dresse une stèle
Qui dégorge les noms
D’ancêtres humiliés.
Dans cet abîme de pensées vides
Je suis là, fils de rescapé
À prier en silence
Alors que le printemps
Fait éclore des arbres
De grenades enfantées.
Les cerisiers en fleurs
Pleurent des pétales roses
Comme un essaim de drones
Décimés par le vent.
Je ne vois que des tombes
Chapelets écorchés, insupportables
Des cercueils maudits
Qui hantent ma mémoire.
FRELUQUETS
Dans la tête souvent leurs idées s’entrechoquent
Qui mises sur le papier sont de vrais camouflets
Que certains d’entre nous croient être réalité
Parole d’évangile à tout le moins loufoques.
Elles ne sont vérité qu’aux âmes malveillantes
Aux râleurs misogynes aux quêteurs d’indigence
Pisse froid, embrouilleurs aux actions égrotantes
Fréquemment elles priment sur leur intelligence.
Nombre de paltoquets débitent des fadaises
Que le commun absorbe comme verre d’hydromel
Affirment que les tyrans n’ont d’autres catéchèses
Pour nous offrir un monde juste et fraternel.
Oyez, oyez bourgeois les mantras des jean-foutres
Car de notre bien- être ils s’en contrefoutrent.
DIALOGUE de FOU
Dans cet enfer de feu
Dans ce bagne de sang
Dans ce lieu souterrain
écrire est espérance
défi et résistance.
Écrire c’est dialoguer
se parler à soi-même.
Dans le cœur de la nuit,
quand tonne le canon
quand les éclairs strient
les confins d’horizon
quand les larmes glacées
forment des écorchures
à nos cils givrés
que le ventre de l’aube
saoulé de sifflements
désespère le présent
quand les matins s’étiolent
dans des rêves insensés
de tasses de café
et de croissants au beurre
émiettés de rancœur.
Quand les journées s’étirent
en d’amers cauchemars
d’assauts désespérés
de conquêtes impossibles
écrire devient alors
un acte de bravoure
une bouffée d’oxygène
sur un feuillet transi.
Écrire des mots d’amour
des prières de paix
relève de l’insulte
faite à tous les mourants.
Écrire c’est être en vie
résister à l’horreur
d’un matin qui se lève
sur un charnier d’envies
toutes plus meurtrières.
L’AVENIR BARBOUILLÉ
Mes pensées courbent la tête
Devant notre avenir barbouillé de doutes
D’obscures prémonitions
D’indicibles douleurs.
Demain, le soleil brillera-t-il encore ?
La lune nous offrira-t-elle un zest d’espérance ?
J’observe incrédule…
La terre ne cicatrise plus
Le nord se noie d’incertitude
Le sud se craquelle d’indifférence
La mer s’infiltre de passagers clandestins
Au large de l’Angleterre.
Ailleurs
Trop de corps dessoudés
Trop de tapages nocturnes
Trop d’alcool dans les alcôves
Baignées de stupre et de fornication .
Tous les chemins qu’empruntent les missiles
Ne mènent pas à Rome !
Habemus papas
Mais aussi des tyrans
Des Satrapes
Des gobe-mouches
De fiers combattants
Et des âmes damnées
Qui s’égrainent à tous vents.
Dix soldats sont morts
Dix autres sont blessés
Un nouveau-né est né sain et sauf.
Notre avenir est barbouillé de doute.
VOEUX
Comme l’eau des rivières
le sable entre les doigts
s’écoule en abondance.
Comme à la queue leu leu les jours se renouvellent
passent leur temps de vie à créer des semaines
qui en fin du compte égrènent des années
en dispersant leurs heures aux aléas du temps.
Quand la salle de torture devient malédiction
Que le cerveau dégorge sa moelle de remords
Quand les maisons se serrent dans des rues de cauchemar
édifient des îlots drogués de résistance
abritent des tyrans assoiffés de rancune.
Quand le ciel d’aujourd’hui se plaint de ton absence
Ô ! Toi le soldat patriote
qui protégeait nos nuits
des missiles et des bombes
venus de tous les âges.
Quand Mémoire de l’enfer
recrache ses assassins
plante ses aiguillons
dans nos flancs découverts
annonce un Noël rouge
et un printemps de sang.
Je vous envoie à tous
mes vœux de liberté.
SURVIVANTS
Il y a ceux qui gueulent
Il y a ceux qui prient
Il y a les gens de bien
et les gens de malheur
Il y a les bohémiens
et les amants de cœur.
Ceux qui s’attachent aux pas
ceux qui disent n’importe quoi
Il y a les voleurs
aussi les recéleurs.
Il y a ceux qui luttent
pour une noble cause
Et tous ceux qui résistent
aux lois des garde-côtes
Il y a ceux qui rêvent
dans la littérature
puis ceux qui sont
des gouffres d’inculture.
Il y a ceux qui dorment
dans des divans de soie
et ceux qui se contentent
d’un simple feu de bois
Ceux qu’on dit miséreux
et qui n’ont pas le choix
Il y a ceux qui gagnent
à la roue de fortune
ceux qui découragés
se tirent balle au cœur.
Ceux qui n’ont de pensées
à mère, frère et sœur
qui ramassent un fusil
et leur tirent dans le cœur
Y a les survivants
pour eux, c’est le malheur.
DESARROI
Dans les villes criblées ils sont tous à genoux
Pour ramasser des miettes de l’espoir dissout
Sans se blesser les mains aux éclats des carreaux.
Les fenêtres béantes sont aveuglées des cris
Les enfants prisonniers d’un turpide ennemi.
C’est de papier carton que sont faits les panneaux
Ils ne reflètent rien, il n’y a rien à voir
L’ennui n’arrive pas à percer la pénombre
Blessés, agonisants, l’école sera leur tombe.
Le missile a frappé, ils faisaient leurs devoirs
Ils étaient plus de cent à être attablés ;
Sur l’estrade le maître détaillait la dictée.
Insouciants, innocents ils étaient tous sages.
Ce sifflement strident était comme un présage
Car derrière la porte la guerre faisait rage.
Sérieux ils s’appliquaient à faire les jambages
Ce moment de lecture avait un goût de miel
Dehors cependant, coulait un flot de fiel.
Maman tu m’avais dit qu’une fois libéré
Du joug de la folie importée de Russie
Nous serions plus heureux, ensemble, réunis
Dans une maison neuve aux tuiles vernissées
Retrouvant notre joie et notre liberté
Mais c’est dans l’autre vie qu’il faut les rechercher !
La justice et l’amour, l’indulgente piété
Sont des mots ignorés par monsieur Duchemin*
Ah !que reviennent vite la douceur des matins.
*Duchemin : traduction de Poutine
LES TRANCHÉES du DIABLE
L’horizon est vide, noir, hybride
La pluie noie l’espace, génocide
Un bruit métallique sourd de la forêt
Aiguisant la terreur dans toutes les tranchées.
Les oreilles vibrent et se bouchent les yeux
Qui s’esbignent pour transpercer la nuit.
Un premier grondement
La foudre s’abat aux chenilles d’un char
Catapulte l’engin en pièces détachées
Qui retombent en drache* coupante et acérée.
La ville, au loin, habillée pour l’hiver
Grelotte des fenêtres fracassées de carreaux
À chaque coup tiré.
La température baisse à en perdre haleine.
Des flocons épais s’agglutinent
Tournoient au ciel en paquets moutonnants
Le vent s’enrhume et cingle les visages
Les hommes figés, écoutent le silence.
Les arbres pleurent leurs feuilles.
Déjà bien rabougrie.
La forêt pétrifiée de douleurs et de rage
N’enfante plus que des lamentations.
L’odeur de la mort parfume les tranchées
La Camarde rode, accrochée à décembre
Le clairon entonne le chant des partisans.
Drache : Pluie abondante
ARMÉE d’OMBRES
C’est une armée d’ombres qui jonchent le sous-sol
Une flopée de soldats comme des feuilles mortes
Des corps ensevelis, les bras tendus au ciel
Dénudés et bleuis, racines aériennes.
Les arbres abattus semblent les imiter
Sur la glace putride, l’hiver stationnait
Un vacarme de silence survivait
Au feu des canonnières et des tirs croisés.
Hier ennemis, ils couchent côte à côte aujourd’hui
Sous les arbres écorchés abreuvés de leur sang.
Avant cette hécatombe ils vivaient d’harmonie
Mais au coeur de l’hiver les Russkoffs ont surgis.
Dans la raspoutitsa les blindés envasés
Tirent à qui mieux mieux, des obus par milliers.
Les snipers à l’affut guettent les mouvements
Le silence aux tympans hurle de douleur.
Les bombes planent longtemps puis piquent vers la terre
Le sol crevassé est plus grand qu’un cratère
Dans le ciel un essaim de drones bourdonnants
Précèdent les bombardiers et leurs rugissements.
Les enfants et les femmes sont avalés vivants
Engouffrés sans mâcher dans l’enfer de l’instant
Ils sont tous devenus des bonhommes de glaise
Pour tous les réfugiés c’est la douche écossaise !
D’OUTRE-DEMAINS
Que de sombres présages
pour l’avenir demain
la terre n’est plus sage,
ne sert plus à rien.
Seuls, quelques robots
en parcourent l’espace ;
La lune est annexée,
Mars a explosé.
Les trous noirs goulument
avalent les planètes.
Quelques humanoïdes
errent dans le néant
se creusent les méninges
et se ramentevoient.
Derrière leur conscience,
des souvenirs abstrus
Joie, peine, allégresse,
terreur, atermoiements.
Inondation de la pensée
mémoire des vagues
dunes d’écume à ouater la plage
blessures des galets
effondrement des roches.
Les pieds des falaises
pleurent d’hydrocarbures.
La soif s’étanche
aux cuves éventrées
d’un tanker désossé.
Âpreté, avarice, égocentrisme… !
Tourments des embruns,
pompes à fuel
mouettes et goélands
pataugeoire d’infamie
tableau de pourriture.
Demains incertains,
espèces décimées
lassitude d’outre-mer
d’outre-demains.
Dans l’inconscient
derrière la conscience
il y a l’insouciance
puis la réalité.
Souvenirs amphigouriques.
ALLUMER le FEU
Les souvenirs s’enrhument de foulards de poussière
Les livres ne se rappellent plus, entrechoquent les mots
La mémoire a des trous qui sont comblés de vide.
Le regard s’est usé à regarder au loin
Les mains tendues ont des doigts de misère
Qui s’accrochent à la vie pour exister encore.
Les mots sont érodés, ne veulent plus rien dire
L’utopie s’est ancrée dans des slogans stupides
Croire ne rend plus heureux c’est la faute à Voltaire.
La vérité d’hier devient charlatanisme
L’histoire réinventée tient lieu de vérité
L’ignorance s’affiche bravant l’érudition.
Les livres sont écrits à l’encre sympathique
L’insouciance habite les esprits vagabonds
L’IA a nécrosé l’esprit des érudits
Ils sont tous devenus des mutants génériques
Hadès leur ouvre en grand la porte des enfers
Et ils courent en chantant allumer le grand feu.
Aux PORTES de L’ENFER
Les ombres s’abritent dans des lieux clandestins
Où les souvenirs, en tapinois, s’infiltrent
Joyeux, mélancoliques, pernicieux ou fantasques
Précieux, insignifiants, désespérants, désœuvrés.
L’absence tourneboulée perd les mots tendres à dire
Il suffit simplement de ne penser à rien
Pour que la souvenance se démène et s’agite
Dans une farandole à perdre la raison.
Je suis l’insanité quand la raison me quitte.
Une folle envie d’espoir envoûte mon angoisse
Être encore une éponge, absorber le présent
L’instant et l’avenir, endurer la souffrance
Mais garder dans les yeux tous les instants d’errance.
Il est temps d’enfiler le suaire de l’oubli
Sur un corps rétréci et tout racrapoté
Pitié ! N’érigez pas pour moi royal cénotaphe
Épargnez la nature ne coupez pas le chêne.
Un cercueil en carton fera très bien l’affaire
Déposez ma dépouille aux portes des enfers
Vulcain n’est pas méchant avec ceux qui prièrent.
CAUCHEMARD
Jamais ne meurt le passé !
Il se terre, se calfeutre
Dans un coin de mémoire
Toujours prêt à jaillir
Avec véhémence
Ou attendrissement
Suivant l’humeur du temps.
Quand les ténèbres baignées
De lueurs éphémères
Tapissent l’empirée ;
Et que dans les tranchées
Rode une mort infecte,
Les hommes ne rêvent
Que des bienfaits de vie
Invoquant l’anamnèse*
Au creux d’un lit douillet
Dans les bras d’une fille.
Ils se gardent de penser
Aux embrouillaminis
Qui affligeaient
Leur existence
Instillant le doute
Et les remords tardifs.
Quand ils reviendront
Si Dieu leur prête vie
Ils garderont enfouis
Les moments de colère
Parfois de trahison,
Qui hanteront leurs nuits.
Mains croisées sur le cœur
Les larmes au bord des cils
L’œil collé au viseur
D’un fusil, d’un canon
Les yeux dans les ténèbres
Ils cauchemarderont
Demandant le pardon.
*Anamnèse : Retour à la mémoire du passé vécu.
LA VIE à BOUT de BRAS
La nuit éteint les dernières lumières
Les rideaux des fenêtres étalent leur ennui
Derrière les volets filtre un rayon de lune
Des ombres se faufilent dans les rues éclatées
Apostrophant les seuils des portes cochères.
Leurs jambes sont lourdes
À porter le fardeau des ans
Leurs sacs à bout de bras
Pèsent leur poids d’errance
Leurs mains sales et calleuses
Cherchent un dernier mégot
Dans la poche trouée
D’un paletot verdâtre
À la capuche pleine
De rêves inassouvis
Et de cheveux ébouriffés, sales.
Car au bout de la mer
La terre est inhospitalière
Le bitume râpe les semelles trouées
La pluie suinte la tristesse
D’un quartier de misère
Aux vitrines explosées.
Les tunnels du métro
Débondent de corps entremêlés
Dans des wagons de désespoir
Aux alertes stridentes
D’un missile en approche.
Sur les quais surabondés
Des matelas s’entassent
Et des plumes volètent
Papillons de douceur
Au cœur de la mêlée.
Mais que recherchent-ils donc ?
INQUIÈTUDES
J’ai besoin de ne plus me voir et d’oublier
Les mots gribouillés sur un papier mâché de rancune
Les notes crayonnées sur une portée de feuilles mortes
Les versets psalmodiés d’une voix d’outre-tombe
Les histoires monstrueuses d’hommes désabusés
Les images d’horreur captées à la va-vite
Les souvenirs maudits de bombes incendiaires.
J’ai besoin d’échapper à la haine complice
D’une vie de tourments dans une cave austère
J’ai besoin d’extirper de mon cœur ravagé
Ces carcasses brulées au volcan de la haine
Et ces corps pétrifiés d’incandescentes laves
Marbrés comme statues par les nuées ardentes.
J’ai besoin d’occulter aux cernes de mes yeux
Ces Murs tagués de sangs peints par des tortionnaires
Ces suppliciés gisant dans des fosses communes
Ces routes défoncées, crevassées de gerçures
Ces champs retournés, boueux et malmenés
Ensemencés de bombes à se glacer d’effroi.
J’ai besoin de quitter sans espoir de retour
Ces maisons incendiées aux murs de la colère
Par des flots ravageurs de lave pyroclastique
Pour Toi
Innocent enfanté une nuit d’inconscience
Toi qui depuis deux ans ne joues plus qu’à la guerre.
DE FEU et de SANG
L’ennemi avançait dans les brumes du soir
Un à un les villages payent un lourd tribut
Les mères affolées sous leur jupe cachent
Les bébés qui n’ont rien connu de la vie
Mais qui savaient déjà ce que mort veut dire.
Les balles et les obus, déluge de ferraille
Inondent la forêt abattant les géants
Les renforts arrivent avec trop de retard.
Les jardins assoiffés de joliesses florales
Absorbent le sang frais des enfants écorchés.
Dans les ruines fumantes, un vieux tout cabossé
Tire des notes de haine de son bandonéon
Personne pour chanter au son de sa complainte
Mais des pleurs en cascades et des sanglots mourants.
Dans ces champs ravagés ne monte qu’une plainte
Des demains, des après ? Que la glaise à pétrir…
Les assassins en nombre envahissent les rues
Violent, ô misère ! Femmes et filles éperdues.
J’ai vu des loups féroces épargner les agneaux !
Mais ces hordes sauvages ne creusent que tombeaux.
L’Afrique à leurs yeux n’est digne d’un drapeau.
CONGO
Dans les forêts immenses
La vie se régénère à chaque pas foulé.
Sur l’espèce pourrie
Nait une nouvelle essence
Qui aspire à la vie se gavant de la mort.
Les forêts sont des ogres
Des goules Insatiables
Qui se dévorent sans cesse
Vivantes à jamais
Sauvages, luxuriantes.
Elles mangent jusqu’aux collines
Qui masquent l’horizon.
Mais l’âpreté au gain
De la faune humaine
N’a aucune pitié ;
Sans le moindre scrupule
Elle coupe, taille et brûle
Des hectares d’existence.
Les grands singes nos frères
Sont boutés de leurs nids
Par les esclavagistes
Qui se disent bénis
Par un Dieu méprisant.
Les hommes aiment la mort
Plus forte que la vie.
Mais qu’ils prennent bien garde
À cette gabegie.
Un jour il faudra bien
Rendre à ces Césars
Habitants primordiaux
Ce qui leur appartient ;
Ce qu’ils ont reçu depuis la nuit des temps.
NUIT BLEUE
A vouloir éteindre la nuit les lampes s’épuisaient
Un halo blanchâtre flottait sur la chaussée
Les passants, vers leur havre de paix, se hâtaient
Nul doute, la sorgue* s’annonçait survoltée.
Dans les rues adjacentes, des groupes se formaient
Encagoulée de noir, la rue s’émancipait.
Sacs à dos, barres de fer, couteaux bien aiguisés.
Certains lançaient déjà des bombes incendiaires
Casquée et cuirassée la troupe stipendiaire
Faisait le pied de grue telle des factionnaires
Attendant de faire feu, unie et solidaire.
La première voiture comme torche flambait
Et le premier assaut venait d’être donné
Le premier homme à terre se faisait caillasser
L’avenue s’enflammait : Au secours les pompiers !
L’atmosphère se tendait, la foule grossissait
Chaque soir, chaque nuit, les vandales sévissaient
Ne laissant derrière eux qu’une terre brulée
Dans Paris saccagée l’histoire se répétait.
La folie meurtrière des banlieues excitées
Certains parlementaires en carence d’idées
Et le gouvernement pleutre et terrorisé
La France peu à peu sous nos yeux s’étiolait.
Les esprits indigents occupaient la chaussée
Les lendemains chantants peu à peu s’étriquaient
Le Président coincé a dissout l’Assemblée
Chacun dans son coin devait se débrouiller.
FLIBUSTE
Les alizés chuchotent à l’oreille des marins
Une histoire de long court peuplées de flibustiers
De forbans, de corsaires, forçats et galériens
Qui toutes voiles dehors écumaient les mers.
Cachés dans une crique à l’abri de l’atoll
Ils lorgnaient l’horizon en quête d’une voile
D’un brigantin haineux dans l’eau encalminé
Pour sonner l’abordage et en piller les cales.
Puis à coups de canon, ils sabordaient l’épave
Revenaient sur l’ilot pour y mener grand train
Festoyer, se saouler jusqu’au petit matin
Leur vie n’avait d’attrait que pour ces coups de mains.
Certains même pratiquaient, la traite et l’esclavage
Ils vivaient de trafics, de coups fourrés miteux
La mer était pour eux une immense aire de jeux
TROUVER les MOTS
L’enfant ce matin trouve des mots à dire
Il a vaincu sa peur, l’appréhension primale
Ababa , areu… mamapa, …
Il s’exprimera mieux dorénavant.
Puis, les années passant, il pourra les écrire
Sauf si la censure en dogme est érigée.
Ces mots s’il le faut, il les arrachera
Et les burinera sur un livre de pierre…
Mais d’où vient ce besoin de vouloir tout décrire ?
Je croyais que les hommes
Étaient roseaux pensants…
Il se trouve qu’en fait ils sont pétris de lois
Font bien souvent fi des recommandations.
Les mots se heurtent alors à de sourdes oreilles
Ils pensent que
Derrière le mur des lamentations
Viendront les épousailles du verbe et de la terre.
Demain sera-t-il fait de silence et de paix
De grande stérilité
Ou de joies et de liesses ?
Ah ! Si jeunesse savait !
Si vieillesse pouvait sans peur et sans effroi
Affronter le passé.
La FUGITIVE
Le village se perd dans l’immensité blanche
L’obscurité poisseuse, le ciel à ras de terre.
La nuit dure des mois parée comme un dimanche
Les aurores boréales entretiennent le mystère.
Le gîte se dresse là près d’un immense lac
La neige a modelé des dunes de silence
L’eau gémit un concert en ce pays cosaque
Les légendes ici viennent prendre naissance.
Un loup de Sibérie d’un œil vif surveille
Le moindre mouvement ou la moindre présence
C’est une sentinelle, figure tutélaire
De la toundra sauvage et des ingrates steppes.
Anna a fui la ville où la police guette
Les allées et venues devant le cimetière.
Une brève visite à sa fille très chère
Un dernier au revoir à ses copains d’hier.
Elle chausse ses raquettes et d’un pas vigoureux
Elle laisse derrière elle des amis malheureux.
Avant elle maternait, accordait sa confiance
À son frère torturé, pétri d’intolérance.
Il a trahi l’Amour en violentant sa fille
Sa vie a basculé et l’absence la vrille.
La tempête jaillit dans la nuit, déchaînée
Elle invoque en silence les Dieux de la forêt.
La lumière de l’aube la trouve allongée
Devant la porte en bois du refuge espéré
Là, elle a lâché prise, son âme s’en est allée
Rejoindre au paradis sa fille bien aimée.
GRAIN de FOLIE
La rue est vide de bourrasques de vent
La brume monte en volutes glacées
Et couvre la forêt d’un manteau cotonneux.
Les passants ont déserté la plage vide d’attraits
Dans le caniveau congestionné une poupée oubliée
Garde les yeux ouverts sur cette immensité.
La milice vient publiquement d’annoncer
Que les poupées et autres marionnettes
Sans voile n’étaient plus tolérées à traîner dans les rues.
Certains craignent que des esprits étroits
Se croient autoriser à trahir notre loi
Prenez garde à vous l’œil de Pékin vous voit.
L’IA supplante l’homme dans ses raisonnements
Et dicte la teneur des traités et des lois
Gare aux récalcitrants qui nous prennent la tête
Nous prédisent un futur rien moins qu’incertain
Tous les pantins et les croquemitaines
Dans un langage par eux seuls compris
Crient à la forfaiture
Le monde n’est que folie.
FEU
Les liens qui le menottent au pied du pilori
sont tissés de mensonges sans aucun alibi
de coups fourrés, d’hypocrisie et de bassesse
de forfaitures et de perfides scélératesses.
À force de prier
à force d’appeler
à force de crier
il est le dos au mur.
Sur ses lèvres s’imprime un murmure étouffé
sur sa peau tatouée de blessures
d’ecchymoses bleuies sous la torture.
Il refuse le bandeau pour lui cacher les yeux
la Mort, il l’affronte avec fierté
il nargue les fusils sans paraître anxieux
stoïque, il attend que quelqu’un dise
FEU
TRAHISON
Depuis la nuit des temps rode la trahison
La confiance est trahie dès le Jardin d’Eden.
Le premier cri poussé par tous les nouveaux nés
est première trahison de la loi du silence
dans l’atmosphère feutrée d’une maternité.
Que savons-nous de demain
si ce n’est l’avenir ?
Que saurons-nous des jours à venir
si on ignore les lendemains ?
Que reste-t-il de nos serments d’adolescence
si ce n’est qu’ils nous paraissaient beaux ?
Que savons-nous de notre vie
qu’il nous reste à écrire ?
Que savons-nous des amis qui demain
délaisseront nos mains, signe de trahison ?
Que restera-t-il de nos amours fugaces
qui se sont délayés dans le grimoire du temps ?
Quels seront nos projets présents et à venir ?
Rester célibataire ou faire des enfants ?
Que savons-nous du monde qui happe nos passions
qui nous sape le corps, nous met en déraison.
Savent-ils les martyres, les amants de passage
que demain sera fait que de notre héritage
de notre abnégation à passer le relais
afin qu’eux aussi puissent écrire une page
Sans trahir la confiance qu’ils mettent dans leurs écrits ?
LÎLE du DIABLE
Je ne suis pas coupable, je ne peux le prouver !
Dans ce pays en guerre je ne fais que passer.
Ma province occupée par ces maudits teutons
Je n’ai pas hésité, je me suis engagé
J’ai défendu la France contre vents et marées.
Mais vous, les procureurs, vous m’avez offensé
Banni et déporté dans mon propre pays
Moi qui donnais ma vie pour sauver la nation
Vous m’avez humilié, vous m’avez dégradé
Entre vos mains perverses, je n’étais qu’avorton.
Dans les îles du Salut vous m’avez encagé
Avez choisi la pire pour me faire expier
Vos propres turpitudes, vos sales exactions.
J’ai subi la torture, la soif et la faim
Des maladies subtiles traitées sans médecin.
Ah ! Cette île du Diable porte bien son nom
L’océan la dévore chaque jour un peu plus ;
Tout moisit, tout pourrit et la moiteur accable
Les plantes et les hommes, il n’y a pas un arbre ;
Le bagne est un charnier peuplé de parasites.
Ô ! Mère, croyez-le, « pas trahi ma patrie »
La lèpre ici gangrène nombre de prisonniers.
Je pense à mon épouse et à mes chers enfants
Les hivers sont pluvieux, l’été est canicule
Existe-t-il un Dieu pour me sortir de là ?
Je rêve de beauté, je suis un fier français
Mais la France fait de moi un vulgaire étranger
Un traitre, un scélérat ; Je jure sur mon âme
‘ J’aime trop mon pays pour l’offrir aux barbares.’
Émile mon ami sauve moi de l’enfer
Aide-moi à porter la croix de l’infamie.
NUL ne PEUT DIRE…
Nul ne peut dire ce que sera demain !
Quand la mer vomit sur les récifs
Le corps des naufragés.
Quand les méduses se collent
Aux ventres des rochers,
Quand le désert ne sculpte plus
De dunes et des roses des sables,
Quand les scorpions des regs
Meurent en faisant l’amour,
Quand la mante religieuse
Déguste son partenaire,
Quand chameaux et dromadaires
Ne bossent plus
Statufiés, ensablés
Au cœur d’un oasis,
Quand, dans le ciel
Des avions containers
Egrènent leurs chapelets de bombes,
Quand pour communiquer
Les missiles se font missives,
Quand le ciel se pare
De lueurs atomiques
Nul ne peut dire ce que sera demain.
ANGOISSE
Les yeux à peine ouverts tout mouillés de rosée
Elle pense aux joies précaires qui l’attendent cachées
Ainsi qu’aux déceptions qui ne vont pas manquer
Dans ce triste matin où les larmes de nuit
Grisâtrent la campagne de nuages de pluie.
Ses rêves la promènent dans des visions bleutées
Mais dès potron-minet lorsque l’aube se lève
C’est le bruit du canon que captent ses oreilles
Et des pensées maussades la tiennent en éveil.
Elle pense à ses fils sur le front engagés.
Elle cueille, délicate, une rose sauvage
L’effeuille en récitant comme avec marguerite
Je vous aime, un peu, beaucoup, à la folie…
Dans ce moment épique entendre un angelot
Qui lui dira : « la paix vient juste d’être signée ».
Alors la nuit prochaine, elle pourra à loisir
S’étendre sur sa couche et enfin s’endormir.
PARDON
Dans ces ténèbres opaques
Je cherche une étoile
Une lueur fugace
qui vienne me guider
me prendre par la main
enfin me soulager.
Je ne vois que le noir
la noirceur des ténèbres
le néant sans espoir
un aller sans retour
un voyage spectral.
Pourquoi ces bons apôtres
me laissent sur le parvis
du ciel qui s’obscurcit
quand le mal tenace
infiltre sa douleur
aux membres endoloris ?
Ma tête tourne en rond
comme mes idées noires
Est-ce l’enfer promis
à tous les mécréant ?
Est-ce passage obligé
Un purgatoire géant ?
J’implore l’empyrée
qui me laisse pantois
Je n’ai tué personne
Et j’aime à en mourir
J’en demande pardon.
EN VÉRITÉ
Tourments tenaces
Plaisirs ineffables
Austérité coupable
Peurs ancestrales
Plantes médicinales
Envies capricieuses
Rancœurs nauséeuses
Haine millénaire
Douleurs temporaires
Agonie sardonique
Résurrection diabolique
Des vies à attendre la mort
La donner sans remord.
À ceux qui font saigner la lune
À ceux dont les armes tissent un voile de brume
À ceux dont les slogans ne sont que platitude
À ceux qui ignorent toute mansuétude
À ceux qui se noient dans des fosses abyssales
À ceux qui ne s’habillent que de suaires sales
En vérité je vous le dis
Ils n’iront pas au Paradis.
NOBLE CAUSE ?
Les causes les plus nobles ne se préservent pas
à coup de patenôtres, de haine ou barbarie.
Quand les rires se muent en éclats de sanglots
Quand les balles sifflent en trémolos de peine
qu’aux hoquets des canons, les enfants s’aplatissent
dans des cratères de feu ;
qu’ils subissent la démence qui dévore les cerveaux
de barbares névrosés, dévots, vilipendés
par des années d’errance et de combats perdus.
Ils cherchent un pays dans le fracas des armes,
faute de savoir vivre en pieuse harmonie.
Un ciel bleu d’azur n’apporte pas à chacun
l’espérance de jours ensoleillés de joie,
car les vents sont contraires, et leurs cris s’époumonent
en vaines espérances de bateaux salutaires.
Les voiles blancs ne sont plus symbole de la paix.
L’esclavage perdure par satrapes séniles aux cerveaux
décavés.
La soumission n’est autre que l’acceptation
du mal être de vivre en peuples libérés.
Les chefs coutumiers ont laissé le pouvoir
aux mains de sycophantes sectaires, mal embouchés
qui par mille promesses déguisées en mensonges
leur ont laissé accroire que le soleil brillait avec tant d’éclats,
qu’il changerait les cœurs jusqu’au tréfonds de l’âme.
Si d’un coup de couteau ils égorgeaient l’enfance.
Des MOTS qui ne DISENT Rien
Des mots se cognent aux cloisons du silence ;
Des borborygmes, un râle, un cri
Viennent déranger les rêves de la nuit.
Le temps s’ennuie à répéter les heures,
La bouche sèche de paroles rocailleuses,
Les yeux brûlent à fixer un horizon d’espoir ;
Je voudrais crier, ameuter le quartier
Avec des mots qui se désarticulent.
Les paroles se balbutient,
Se heurtent à l’indifférence.
Que de gesticulations pour se faire entendre !
Les mots se psalmodient dans des versets barbares.
Où sont passés les oiseaux bleus des îles
Sont-ils comme nous encagés
Muselés
Pour satisfaire l’envie de ceux qui nous maltraitent ?
Je ne peux vous écrire,
Les mines de crayons se sont barricadées
Carand’Ache a mis la clef à la poterne
Devant tant d’analphabétisme.
Ô, Graver à tout jamais
Au burin sympathique
Des pamphlets dans le marbre dur comme des rocs.
Nos bourreaux crient sans cesse
Des ordres et des contre-ordres.
Mes bougies ont rendue l’âme et fument de dépit.
Tous les sens en alerte
Aux moindres bruits de pas !
Mes oreilles saignent, stridulent.
J’ai le cœur en jachère.
Je suis l’abandonné, le délaissé pour-compte
Je suis la piste à suivre
Je suis cet infidèle
Le cancer me survit sur des mots de courage.
Dehors,
Le vent assèche les espoirs d’avenir
Je puis vous l’avouer
Je suis emprisonné
Cul par-dessus tête
Dans une geôle incertaine
Au cœur de Sibérie.
DANS un SOUFFLE de VENT
Quand le vent vient souffler sur la crête des dunes
Modèle le relief au gré de ses envies
Et anime le ciel de lourds nuages gris
Je vais parfois prier.
À genoux sur la pierre
Des roses dans les mains
J’effeuille leurs pétales aux rafales insolentes.
Dans ma tête revient, obsédante
Cette phrase glanée au cœur de ‘l’Étranger’
« Aujourd’hui maman est morte »
Que va-t-il se passer dans le cercueil en terre ?
J’ai lu dans un grimoire les différentes phases
De la déconstruction, quand les mouches à viande
Évident le cerveau, notre ultime matière.
Le rite accompli, la tête dans les mains
Je restais statufié seul avec ma douleur
Ange de la mort parmi les survivants.
Quand la voix s’éleva depuis la nuit des temps
Me murmurant tout bas :
« Ce jour sera pour toi un jour de renouveau
Tu vas te confronter pour la première fois
ÉPITAPHE
Ils sont l’étoile jaune aux portes des cimetières
Gardiens immobiles des âmes trépassées
Leur tête ne se courbe que les jours de grands vents
Majestueuses sentinelles fières et élancées
Du site, les cyprès, sont l’éternelle entrée.
Les jours d’enterrement ils saluent les cortèges
D’un signe de la cime que le mort ne remarque.
Le jour de la Toussaint, jour de réjouissance
Les mains embarrassées de pots de chrysanthèmes
Pensent-ils qu’ils perturbent la vie des morts-vivants ?
Seuls les vrais croyants viennent le lendemain
Qui, lui est consacrés, jour des morts s’entend.
Pour ma part je voudrais fuir ces lieux austères
Amis, promettez-moi ! Jamais de cimetière
Mais une urne en grès, façon artisanale.
Gravez simple épitaphe : « Ci-git un amoureux
Des arts et des lettres laissez-le vivre en paix
Une mort souveraine. »
POST-SCRIPTUM
L’Encre a bavé sur le papier
Effaçant les mots aveuglés
D’un sentiment affiché.
Le poème pleure de l’absence.
Ces larmes ont tout gâché
C’est pourquoi je l’ai gardé
N’ai pu te l’envoyer
C’était des mots d’amour effacés.
Des mots d’amour bien placés
Des mots venus du cœur
Dans cette nuit de douleur
L’encre a bavé sur le papier.
Les ROSES Du VENT
Des murmures à crever les tympans
Percent à nos oreilles.
Dans des geôles puantes
Des tranchées de misères
Tassées de corps meurtris
Point ne se lassent les satrapes.
D’Anchorage à Moscou
Ils écrivent l’histoire
Les doigts tachés de sang.
Les cris des enfants qu’on égorge
Arrachés du ventre de leur mère
Sont une douce musique
A leurs tympans velus.
Ils n’appellent à la paix
Que pour nous divertir
Entendre les obus
Siffler dessus nos têtes
Est une symphonie
Un nectar de sons fait
Pour les désennuyer.
Des larmes d’amertume
Mêlent leurs reniflements
Aux vapeurs d’essence
Aux vociférations
D’êtres encagoulés.
En ce début octobre,
La haine à débondé
Sur le sable où la fête
Avait pour synonymes
Paix aux hommes de bonne volonté.
Pour un voile oublié
Dans un moment d’absence
Pour une étoile jaune
Cousue sur un revers
Ils sont sortis de terre
Armés d’atrocités.
Savent-ils que le sable
Nous glisse entre les doigts
Et n’enfante jamais
Que des roses des vents ?
CONCLUSION
Enfant de l’après-guerre
À l’orée de mon âge
Né de père disparu
En pleine canicule
Encaserné très tôt
Entre mains de curés
À la soutane austère
Bien que parfois volage.
Sous des arcades mornes.
J’ai subi les sermons
De ces bigots prieurs
Et j’ai souvent suivi
Des chemins solitaires
Avec pour amis
Bob Morane et les siens.
Mes ancêtres avaient tous, à la vie
Fait un grand pied de nez
Avaient déjà rejoint
Les mannes des trépassés.
Coupés de mes racines
Je n’avais pas de trace
À suivre, à imiter.
Étaient-ils du commun
Ou héros audacieux ?
Je n’ai pas de passé
Je suis la feuille vierge
Et je dois m’inventer
Une lignée secrète.
Faire la route encombrée
De bien de cimetières.
Je n’ai que peu suivi
La voix de la raison
J’ai combattu souvent
Mensonges et trahisons.
J’ai refusé les mains
Parfois qu’on me tendait
J’ai suivi des chemins
Qui n’ont laissé de traces.
Je me suis bosselé
Aux fronts de l’injustice
J’ai dénoncé la haine
Le parjure, la violence
Ma plume aujourd’hui
Écorche ma feuille blanche.
S’il m’est arrivé
De cultiver la chance
J’ai eu mon overdose
De règlements de comptes
Je n’attends plus grand-chose :
Faire le grand voyage.
Si j’ai roulé ma bosse sur les routes de France, j’ai toujours était fasciné par l’actualité. L’art de martyriser les autres n’appartient qu’à une seule famille sur terre.
L’homo-sapiens doit prouver sa sagesse ! Le peut-il ?
J’ai voulu dans ce recueil, dénoncer les outrances de nos contemporains. Ce sont des vers amers qui crient la vérité. Mais ce n’est rien encore, l’orage est à venir.
Pourquoi les jeunes générations gémissent-elles ? De défaitisme en larmoiements de colère en destructions. Dans les démocraties n’ont-ils pas compris que leur avenir est à leur portée. C’est à eux à la construire et d’arrêter leurs jérémiades stériles. Dans les tyranograssies ce sont les gobe-mouches qui organisent leurs vie. Que ne vont-ils essayer de survivre dans les pays totalitaires ? En revenant, ils trouveront sûrement la clef pour améliorer leur vie et celles de ceux qui ont construit un monde meilleur à celui qu’ils avaient connu.
C.D
4 replies on “Des Vies à Fleur de Peau.”
merci pour ce recueil 😉
merci d’avoir pris la peine de le lire ou de le consulter. Écrivez-vous aussi des poèmes. Si oui, Avec quelques Amis, sous l’Égide du poète Alain Morinais, nous venons de créer “La Nouvelle Pléiade d’Arcueil; dont l’ouverture se fera à Arcueil le 29 Novembre 2025. De Nombreux Poètes et Associations se joints à nous. 2 réunions par an. Possibilité de lire vos textes et de participer au concours de l’Écritoire du poète. L’Adhésion est entièrement gratuite. Plus de Renseignements sur le site. Claude
Bonjour,
Pourriez-vous publier un petit article sur le site afin de relayer l’évènement ?
La Nouvelle pléiade d’Arcueil à vu le jour en 2025 à l’initiative du poète Thaisien Alain MORINAIS. il est accompagné d’Armelle DUPIAT AELLEN; Claude DUSSERT; Elena FERNANDEZ-MIRANDA; Jo CASSEN. Marie-josé PASCAL. Philippe COURTEL et Roland SOUCHON qui ont qualité de membres fondateurs. La grand journée d’ouverture aura lieu le 29 Novembre 2025 au Centre Marius SINOBRE – 26, Rue Raspail – 94410 ARCUEIL. Pour acquérir la qualité de membre une participation personnelle et active est demandée. Aucun droit d’entrée. Il suffit de se manifester auprès D’Alain Morinais qui leur fera parvenir plus amples précisions quand aux horaires et le déroulement de la journée. Tous les poètes sont attendus sans discrimination aucune.
Ce projet s’inscrit dans la lignée d’une tradition littéraire prestigieuse et fait résonner l’histoire de la poésie avec le présent. Je répondrais mesure de mes possibilités aux questions de vos adhérents et vous tiendrai au courant au fur et à mesure des infos. Vous pouvez vous rendre sur le site directement.